Lust, Caution

aff film_3.jpgLust, Caution s’ouvre sur une partie de mah-jong jouée par quatre femmes. On est en 1942 à  Shanghaî sous occupation japonaise et cette première scène enchante par les mouvements amples et aériens de la caméra, les échanges frivoles et mondains des quatre partenaires. Le motif du jeu – pour nous incompréhensible – revient plusieurs fois avec toujours autant de grâce et de mystère. Hélas, ce sont bien les seuls instants à  sauver d’un film par ailleurs profondément ennuyeux et alambiqué.

Après ce préambule engageant, Lust, Caution opère un long flash-back où on découvre à  Hongkong Wong, une des futures quatre joueuses qui n’est pas encore Madame Mak. Etudiante douée pour le théâtre, la jeune fille adhère à  un groupe d’étudiants qui ont fui le continent occupé, poussés par leur patriotisme et leur ferveur juvénile à  entrer dans l’action. Qui consistera, ni plus ni moins, à  tuer Monsieur Yee, politicien collabo, autoritaire et tortionnaire. Pour approcher sa proie, Wong devient donc Madame Mak, épouse fictive d’un homme d’affaires local, pourvoyeuse de différents biens de consommation rares et recherchés pour Madame Yee et ses amies.

Lust, Caution tient d’abord du thriller et du film d’espionnage où Wong se dépossède de plus en plus de son identité pour se couler dans son rôle qui l’amène à  être la maîtresse de Yee, homme taciturne et violent. Lorsque le film dans sa seconde partie se concentre sur le couple, il se transforme du coup en fresque romanesque, ponctuée des nombreuses scènes sexuelles qui revisitent quelques positions du Kama-sutra.

Comme pour son précédent film – le bien plus réussi Le Secret de Brokeback Mountain – le taîwanais Ang Lee adapte une nouvelle. Il s’agit ici d’un texte de la romancière chinoise Eileen Chang, écrit à  la fin des années 60. C’est une sacrée gageure à  transposer un court récit en un film de plus de 2h30 sans susciter l’ennui ou la répétition.
Ici, tout est étiré et compliqué inutilement avec la multiplication des lieux et des époques qui surcharge une narration qui aurait beaucoup gagné en suspense et intensité à  être linéaire. En dépit de leur jeu impeccable : Tony Leung toujours magistral même dans un rôle de personnage antipathique et la découverte Tang Wei, presque une femme-enfant – les comédiens semblent installer une distance qui les désincarne. Une impression que les décors très carton-pâte viennent accentuer.

Film académique et manquant cruellement de souffle et d’inspiration, Lust, Caution offre en plus une résolution bien terne qui l’aplatit un peu plus. Difficile de se passionner pour cette épopée trop glaciale et artificielle.

Patrick Braganti

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Lust, Caution
Film chinois de Ang Lee
Genre : Thriller & Romance
Durée : 2h38
Sortie : 16 Janvier 2008
Interdit aux moins de 12 ans
Avec Tony Leung Chiu Wai, Tang Wei, Joan Chen

Plus+ :
le site officiel du film

La bande annonce :