Frozen River

affiche_5.jpgLes problèmes d’émigration et de clandestins que connaissent les Etats-Unis sont souvent dans la littérature et la cinématographie nationales localisés sur la frontière sud avec le Mexique. Plus rarement, les auteurs et cinéastes voient du côté du Nord où pourtant le phénomène existe également avec la proximité du Canada et les nombreuses régions boisées et isolées qui parsèment la région. C’est un des aspects abordés dans Frozen River, premier film d’une jeune réalisatrice américaine, Courtney Hunt.

Avant de faire du trafic d’immigrants clandestins un ressort dramatique de son film, Courtney Hunt nous immerge dans l’univers de Ray et de ses deux garçons, dont le père vient juste de quitter le foyer après avoir dilapidé au jeu l’argent prévu pour l’achat d’un nouveau mobile-home. Car pour l’heure, ce qui tient lieu de résidence à  la famille de Ray, c’est une vieille maison inconfortable et détériorée, mal équipée pour affronter les rigueurs climatiques de l’endroit. Travaillant à  temps partiel, faisant de moins en moins face aux dettes qui s’accumulent, Ray en vient à  accepter le marché que lui propose Lila, une jeune mère célibataire vivant au coeur de la réserve des Mohawk, une des six subdivisions de la Nation iroquoise.
Ray, aux côtés de Lila, devient ainsi passeuse au volant de sa voiture avec laquelle elle traverse la réserve indienne – un territoire neutre et tribal, régi par ses propres codes, où la police locale ne pénètre pas – et la rivière gelée en cette période de fin d’année, ; Noël approche et Ray a plus que jamais besoin d’argent, pour ne pas voir l’agence de location,  reprendre la télévision et, surtout, pouvoir mettre quelque chose sous l’arbre de Noël.

Frozen River est à  la fois une chronique sociale et un thriller. Une chronique sociale puisqu’il s’intéresse à  une catégorie d’américains auxquels le cinéma d’outre-Atlantique prête rarement attention, celle en constante progression d’un sous-prolétariat précaire, relégué dans des zones périphériques, tentant de survivre et de s’en sortir. Un thriller ensuite lorsque Ray entame son activité de passeuse, où les conditions hivernales, la présence de la police aux limites de la réserve et la crapulerie des trafiquants sont autant de chausse-trappes. Centrée sur la nuit de Noël, cette partie du film voit aussi le rapprochement de Ray et de Lila jusqu’à  un dénouement inattendu, où l’abnégation n’est pas bien loin.

Réalisé par une femme, mettant en scène deux personnages féminins, Frozen River possède à  l’évidence une patte reconnaissable. Cependant, il est aussi un film d’action et ne fait pas de son héroîne Ray un personnage d’emblée sympathique. En cela, on établira des rapprochements avec la Julia de Erick Zonca ou encore la Angie de Ken Loach. Film sombre et haletant, Frozen River convainc aussi par sa maîtrise et son traitement sec, sans digressions superflues. Une bonne surprise de début d’année.

Patrick Braganti

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Frozen River
Film américain de Courtney Hunt
Genre, : Drame, thriller
Durée, : 1h37
Sortie, : 7 Janvier 2009
Avec Melissa Leo, Misty Upham, Michael O’Keefe

La bande-annonce, :

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