Je mourrai pas gibier, de Alfred

jemourrai_pasgibier.jpgAprès le succès du magnifique »Pourquoi j’ai tué Pierre » (cf chronique) en compagnie d’Olivier Ka (Prix du public et »Essentiel » à  Angoulême), et le beau projet »Paroles sans papiers » (cf chronique) auquel il participe, Alfred se lance dans l’adaptation du roman de Guillaume Guéraud, (paru en 2006 au Rouergue), une oeuvre radicale pour une BD coup de poing qui ne laissera pas indifférent le lecteur.

Sans que l’on sache au départ pourquoi, un adolescent fait un carnage autour de lui, vide une boite de cartouches et tire sur tout ce qui bouge. Raconté en flash-back par le narrateur, le récit nous plonge à  Mortagne, une bourgade de province, une commune partagée entre deux clans qui se haîssent. D.’un côté, il y a ceux qui travaillent la vigne au Château Clément et de l’autre, ceux qui travaillent le bois, à  la scierie de Monsieur Listrac »Et entre les deux il y a Terrence, un simple d’esprit qui vit à  l’écart dans la forêt, sur lequel on se défoule et par qui, indirectement, tout va arriver.

Fait divers, presque ordinaire, comme en trouve souvent dans la presse locale de province, »Je mourrai pas gibier » est d’abord le récit d’un drame familial dont on connaît l’issue dès le départ mais dont les tenants et les aboutissants ne seront dévoilés qu’au fil du récit des événements. Un récit froid et chirurgical, raconté avec un ton détaché et distancié forcément bouleversant qui met en lumière le côté sombre et bestial de la nature humaine quand celle-ci se complait dans la bêtise et la médiocrité.

Sans temps mort, sans digression ni pathos, Alfred livre un récit dense et captivant dont le dessin, à  la fois léger et brut, (on pense par moment à  Gipi) colle finalement bien avec l’état d’esprit de l’adolescent criminel au coeur de cette tragédie.

Benoît Richard

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Je mourrai pas gibier (one shot)
Scénario & dessin : Alfred
d’après le roman de Guillaume Guéraud
Editeur : Delcourt : Coll. Mirages
112 pages – 14,95€¬
Parution : 7 janvier 2009