Tatarak

TATARAK.jpgMétamorphose de la mort en un chant d’amour au cinéma. Andrzej Wajda, dont l’activité artistique rayonne depuis maintenant 60 ans dans le cinéma mondial, fait appel à  sa muse Krystyna Janda pour plonger dans les méandres du deuil féminin.
« Tatarak » obsédé par cette nature purificatrice et ce rappel terrifiant qu’est le fantôme, se base sur la perte du mari de l’actrice (Edward Klosinski, qui travailla pour Wajda en tant que chef opérateur sur 6 films), pour entremêler la ‘mise en deuil’ personnelle de Krystyna Janda avec la fiction de Wajda.

« Tatarak » est un étrange film, construit sur les abîmes de plusieurs éléments : entre cinéma et documentaire, mise en scène et mise à  nue, fiction et réalité, photographie et tableau, improvisation et composition, cette oeuvre amère et d’une profonde tristesse se ressert sur nous sans que nous puissions réellement savoir quelle étreinte Wajda utilise. Son récit, tortueux, voire ingénieux dans le montage insondable qu’il lui offre, a quelque chose d’une exorcisation des douleurs et des souvenirs. Ainsi la beauté de l’image et les rayons de soleil ne peuvent contredire la nostalgie plombante du film, la lassitude de comédiens en souffrance, les ténèbres malignes qui semblent engloutir chaque plan. Cette mise à  nue est tellement personnelle qu’elle ne peut adhérer à  la démarche première du cinéma, celle du partage. La redoutable longueur du film, qui entend suspendre les sentiments perdus, submerge toute la passionnante configuration du film et son fonctionnement sensitif. La grisaille, les vrais morts dont on parle, la joie perdue, tout cela n’est qu’une déprimante réalité parfois maquillée en une fiction tout aussi morbide et malheureuse. Wajda et Krystyna Janda y sauvent peut-être leurs âmes, mais la nôtre semble s’enfoncer dans une dolente et macabre sensation de perte.

2.gif

Jean-Baptiste Doulcet

Tatarak
Film polonais de Andrzej Wajda
Genre : Drame
Durée : 1h25
Date de sortie : 17 février 2010
Avec Krystyna Janda, Pawel Szajda, Jan Englert…