Chroniques express 73

denims.jpgRetrouvez les chroniques des albums de Féloche, Sophie Hunger, Yacht, Castanets, Nacho Umbert & la compagnia, Madjo, Quand la diva s’en va, Kele Okereke, Wild Beasts, The Irrepressibles, John Grant



féloche.jpgFéloche – La vie cajun

Déjà  quelque temps que ce drôle de baroudeur sillonne la France avec sa mandoline sous le bras, en rêvant de bayou et de rockabilly avec l’aide de punks ukrainiens ou de sieur Dr John himself. Autant vous dire que Monsieur Félix, de son prénom, aime l’éclectisme et tient à  nous le faire savoir. Première écoute, influences assumées diverses : on pense à  Comelade, aux Strays Cats, à  toute la scène »chanson française réaliste »… un mix bigarré pour un album qui l’est tout autant. De quoi être également déconcerté de prime abord : c’est un peu sans queue ni tête, les divers mélanges musicaux se télescopent un peu trop violemment, l’ensemble manque de liant, de cohésion, trop foutraque pour emporter directement l’adhésion. Et puis, lentement, la magie commence à  opérer, on se laisse porter par les flots musicaux du Féloche, tourné vers le rock cajun cher à  son mentor »Gris-Gris » John invité pour un magnifique titre, mais tourné également vers des sonorités proches du folklore balkan. Débordant d’énergie, parfois osé, parfois en grosse panne d’inspiration, la vie cajun a toutes les qualités et les défauts des premiers albums remplis à  ras-bord d’imagination, d’envie et d’énergie. Pas de quoi s’emballer non plus, mais de quoi donner envie de suivre l’artiste dans ses chemins de traverse futurs… (2.0) Jean-François Lahorgue
(Ya Basta / 2010) – http://www.myspace.com/feloche

sophiehunger.jpgSophie Hunger – 1983

Un troisième album que j’attendais avec impatience de la part de la jeune et talentueuse suissesse : Monday’s Ghost, deux ans auparavant, avait été un de mes coups de coeur, en même temps que Sophie Hunger était devenue une révélation auréolée d’un joli succès. Pour ce nouvel opus, intitulé de son année de naissance, la belle à  voix d’or nous menace d’un revolver sur la couverture de l’album alors qu’elle nous caresse les oreilles avec le magnifique Leave me with the Monkeys d’introduction. Belle promesse, mais qui ne se concrétise pas tout à  fait. Ecouter 1983, c’est se prêter au jeu de la topographie du pays helvétique : ce sont des montagnes russes, beaucoup de sommets et quelques creux. Sophie Hunger s’essaie à  beaucoup de styles, mais peine à  emballer sur la plupart des morceaux, bien en-deçà  de ce qu’elle peut ou a pu produire. On s’ennuie un peu à  l’écoute de Citylights forever ou travelogue alors que Headlights, breaking the waves, 1983 en langue allemande – jamais été aussi belle d’ailleurs ! – et enfin train people en final piano-voix émouvant sont des réussites prouvant que Sophie a toujours tout d’une grande. Mais je regrette juste que l’album ne soit pas à  la hauteur de son précédent. (2.5) Jean-François Lahorgue
(Universal Jazz / 2010) – http://www.myspace.com/sophiehunger

Yacht.jpgYacht – See mystery lights

Séance de rattrapage pour l’album de Yacht, paru l’an dernier sur le label de James Murphy, sur la foi d’un single chaloupé et qui s’imprime de manière indélébile dans le crâne, le bienfaiteur Psychic City. Rythmique saccadé, boucles électro-rock pas trop sauvages sur lesquelles se posent une voix féminine nonchalante : les ombres de LCD Soundsystem, Blonde Redhead ou The Go!Team ne sont pas bien loin… L’album, par contre, ne joue pas cette carte gagnante sur toute sa longueur. Malgré un début prometteur (l’ascension intéressante des styles sur Ring the Bell), See Mystery Lights, comme encore bon nombre d’albums, semblent se cantonner au minimum syndical dans un ultime dessein : faire remuer les guiboles sur des sons électriques (devenu par ailleurs une des marques de fabrique du label DFA). On s’ennuie assez souvent (It’s Boring le bien-nommé, qui n’en finit pas !), même si des morceaux comme l’instrumental Summer song ou I’m in love with a ripper semblent remplir leur office. Peut mieux faire… (2.0) Jean-François Lahorgue
(DFA / 2009) – http://www.myspace.com/yacht

castanets.jpgCastanets – Texas Rose, the thaw and the beasts

C.’est beau, lent, calme comme une route du far west Castanets. C.’est joli, langoureux et country comme du road movie. C.’est super bien fait Castanets, ca ferait pleurer les pierres avec une voix qu’on dirait fauchée à  Johnny Cash. Oui. Mais c’est aussi un disque à  réserver uniquement aux inconditionnels du genre. Pour moi, désolé, c’est un peu aussi comme une évocation musicale de l’état de la peine de mort. Ca me rend, triste, ça me mine le moral »Et pourtant, dès que l’album se termine je l’ai déjà  oublié. Pas inconditionnel de cette neo-country où j’ai trouvé quant à  moi avec des gens comme les frères Nourallah, Richard Bruckner, Silver Jews ou même Damien Jurado, des artistes qui correspondent plus exactement à  ma sensibilité. Castanets n’oublie aucun des codes : des choeurs à  la steel guitar, du mid tempo aux santiags terreuses. Mais me laisse un peu sur le bord du chemin. Mauvaise pioche. Bien torchée, mais pas pour moi (3.0) Denis Verloes

Asthmatic kitty / Differ-ant – 2009 – http://www.myspace.com/castanets

nacho.jpgNacho Umbert & la compagnia – ay

Je suis sûr que ma méconnaissance de l’espagnol me prive d’une partie du charme de l’album de Nacho Umbert. Le bonhomme distille des mélodies folk servies par une guitare classique, un piano, un discret violoncelle et une batterie brossée en mode mineur. La voix de ténor du chanteur prend l’essentiel de la scène, parfois porté par un choeur féminin. Les mélodies sont subtiles et ne prennent pas immédiatement possession de la mémoire. l’ensemble ne manque nullement de charme, mais de la même manière que je me demande ce qu’un Anglais goûterait d’un album de Samir Barris, des Créatures de Katerine où du Négatif de Biolay ; j’ai l’impression désagréable de rater une grande partie de la chanson, parce que je ne comprends pas l’idiome. Et du coup, sur la longueur, le disque charmant perd en efficacité. Barrière de langue, je te hais (3.0) Denis Verloes

Acuarela/Import – 2010 –

madjo.jpgMadjo – EP

Pour une raison que j’ignore, la hype semble s’être éprise de la punk à  chien sans chien ZAZ. Pourtant en matière de néo hippie, avec le ruban dans les cheveux, Madjo se pose là . Sauf que à  l’opposé de l’indigence de la première citée, Madjo parle au moins deux langues dans ses chansons et parvient à  rythmer autant le français qu’elle manie autant que l’anglais avec lequel elle jongle. J.’ai quant à  moi une préférence pour sa version anglophone dans cet EP qui donne pourtant à  voir l’éventail de ses possibles en matière de pop ethnique mâtiné de funk et de rythmes world. Efficace, les 4 titres de ce EP donnent à  voir une artiste et pas une image unique de traveller. A suivre (3.5) Denis Verloes
(Mercury /Universal) – http://www.madjo.fr/

Quand la diva s’en va – Autoproduit

Que donnerait M s’il était moins lisse ? Que donnerait une pop française fendarde qui devrait autant au Wampas qu’à  la variété, autant au Katerine de robots après tout riche d’une écriture aux petits oignons qu’à  la faconde des vainqueurs de la nouvelle stars nés en France au début des années 2000 (Doré,Willem ») , rassemblés dans un mélange contre nature: quand la diva s’en va. Assurément. Rencontrés au hasard du clip ça me vexe au sous-titrage manuel qui envoie l’essai de Chamfort dans le domaine dans les cordes, QLDSV la bande à  Boltan propose une pop à  l’esthétique très aboutie et à  l’univers complètement défini. Que c’est à  tel point qu’on se dit qu’un directeur artistique fatigué n’aurait qu’à  se baisser pour en faire son poulain pour la rentrée. Après on aime, ou on aime pas, mais la démarche est diablement assumée. (3.0) Denis Verloes

Autoproduit – 2009 – http://www.myspace.com/quandladivasenva


kele.jpgKele Okereke – The Boxer

Kele Okereke est surtout connu pour être leader charismatique des Bloc Party. Il décide ici de laisser sortir ses démons en un album solo pour ma part plutôt mitigé. Le bonhomme y explore un versant quasiment totalement fait d’expérimentations électroniques orientées dancefloor (pour la référence, on pourrait citer Death in Vegas ou Chemical Brothers dans le traitement du son), pourquoi pas. Sauf que »au-delà  de l’introductif walk tall qui laissait présager une incursion intéressante dans un univers seulement effleuré par Bloc Party, le reste de l’album fait la part belle à  une espèce d’Eurodance tournée vers le clubbing quasi bourrin, mais jamais totalement assumé comme tel (et vas-y que je te place un chant à  la Depeche Mode, vas-y que je triture mon son sur le gros beat qui tâche). Parfois, dans le genre, je parviens à  me dire que David Guetta est diablement plus efficace, ou qu’il en ferait des remixes diablement plus efficaces. Dommage. Je m’attendais à  plus abouti, ou totalement différent. Je reste sur le seuil de l’album, dubitatif. Il faudrait que je le teste en soirée, pour voir si la froideur de l’ensemble parvient à  enflammer quand même la piste. Là  je reverrais peut-être mon jugement (2.5) Denis Verloes

Cooperative Music – 2010 – http://www.myspace.com/iamkele

wild_beasts.jpgWild Beasts – Two dancers

Il est temps de rendre hommage à  Wild beasts qui tourne depuis longtemps dans mon lecteur, sans que j’arrive réellement à  trouver quoi en dire. Voici un album qui mélange une atmosphère entre gris clair et gris foncé, mélange de rythmes électroniques inspirés de la new wave et pop song tristes à  guitares contemporaines, avec moultes réverbs, placées en retrait dans le mix. Voilà  un disque dont j’apprécie chacune des mélodies, voilà  un disque qui me passionne : hooting and howling par exemple me revient souvent en tête »mais qui finit par m’irriter, tant la voix qui le porte me file des boutons sur la longueur. Le frontman chante avec une voix de femme comme on en oserait pas chez les transformistes de Michou, et sur la longueur de l’album je déclare sans doute un peu forfait. Pourtant, en analysant, je me rends compte qu’une bonne part de la magie, de l’aura que parvient à  créer l’album autour de lui, provient justement de cette androgynie vocale exagérée. Que le  » freak  » ainsi créé est le meilleur maître loyal d’un cabinet des curiosités qu’on croirait fauché au clip de Never Enough par les Cure. Je recommande. Mais uniquement si vous parvenez – comme moi à  force d’écoutes- à  vous faire à  cette voix si particulière (3.5) Denis Verloes

Domino/Beggars – 2009 – http://www.myspace.com/wildbeasts

irrepressibles.jpgThe Irrepressibles – Mirror Mirror

Etrange mélange que ces irrepressibles. Un décorum très théâtral qui mélange le fantôme de l’opéra et les vocalises façon Christian Voltz ou Diamanda Gallas, servi sur une musique qu’on pourrait croire composée par the Divine Comedy. Il y a des envolées, des hurlements, des pianos, des violons et des xylophones dans cet étrange spectacle grimé de toutes parts. J.’ai été d’abord surpris, puis même emballé par ce mirror mirror qui ressemble à  quelque rock opera from the crypt. Malheureusement l’ensemble, parfois redondant, parfois irritant, parfois en recherche des mélodies (que la richesses des arrangements ne parvient pas toujours à  compenser) peine à  tenir le coup sur la longueur d’un album. On glissera l’ensemble quelque part juste après le DVD d’Edward aux mains d’argent et à  côté des hybrides d’Antony et de ses Johnson’s. Déroutant, intéressant, vocalement perturbant, mais ici un peu éreintant sur la longueur d’un album. A réserver aux avertis, comme on dit parfois quand on ne sait plus trop quoi en dire. (3.0) Denis Verloes.

Cooperative Music – 2010 – http://www.myspace.com/theirrepressibles

johngrant.jpgJohn Grant – Queen of Danemark

Quand un album est juste parfait, je suis parfois aussi embêté que lorsqu’il s’agit d’une bouse sans nom. C.’est le cas avec le mélancolique queen of Danemark de John Grant. Une guitare folk qui sonne, une batterie qui bat la mesure, un piano plaintif, un violon ou une flute charmeuse, un choeur évanescent et une voix qui doit autant à  Bradly Drown Boy qu’à  Elliot Smith, voilà  les ingrédients de ce queen of Danemark bien sous tous rapports. Soit un joli mélange de classicisme folk pop et d’arrangements somptueux pour conter des ballades en demi teinte qui démarrent en douceur jusqu’à  atteindre la grandiloquence, sans jamais toucher au pompeux. On pense parfois à  Elliott Smith, parfois à  Pink Floyd qui se serait débarrassé des scories psychédéliques. On savoure, on déguste le charme simple de cet album classique et classe. Ce genre d’albums qui retournent les coeurs des filles et que je jalouse parfois dans mon coin. (4.0) Denis Verloes

Bella Union /Cooperative music – 2010 – http://www.myspace.com/johnwilliamgrant