Deus – Following sea

Dans une Belgique faite de clivages linguistiques et de tensions nationalistes exacerbées, que le fleuron de la musique anversoise publie le premier single de son nouvel album en français, est dans mon esprit retors, un chouette pied de nez aux certitudes des pense petits.

Un pied de nez joué à  quatre mains, d’une écriture quasi automatique dont Jean Louis Murat habitué du genre, risque bien d’être jaloux à  vie.

Deus est de retour donc, pour un following sea paru finalement assez proche de sa précédente livraison keep you close chez Pias en 2011. Et à  mon grand plaisir, la nouvelle sortie est un bon cru. Bon une fois cette sentence lancée, il convient de nuancer. On est encore loin des premières fulgurances rassemblées à  jamais sur les trois premiers albums de la formation : worst case scenario, in a bar under the sea, et -l’album que les Français adulent pour toujours- the ideal crash.

Mais sérieusement, depuis combien de temps n’avais je plus écouté un disque de Deus sans me forcer à  penser au génie d’antan pour cautionner l’écoute du nouvel opus. Deus avait perdu ces dernières années quelques bribes de son Mojo d’avant, même si un demi mojo pour Deus est toujours suffisant pour surpasser largement un production indé pléthorique.
Pour rappel:

Deus déroulait en s’appuyant sur les preuves de son passé glorieux, pour continuer en roue libre une carrière entamée sur les chapeaux de roues sonores. Et franchement, Following sea a la bonne idée se remettre un peu en question. Même si cette remise en question consiste surtout à  s’en aller lorgner du côté de in a bar under the sea, ou du mini album my sister = my clock pour trouver la couleur générale de son nouvel essai.

Deus se réapproprie ses arguments fondateurs. Un Tom Barman à  la voix en avant dans le mix, une guitare qui n’a pas oublié son bréviaire blues rock, quelques claviers, et un tangage perpétuel entre rock jouissif et ballades déconstruites. Une formule originelle à  laquelle la bande, vieillissante, ajoute quelques artifices autorisés par la production chiadée et la maturité des musiciens à  l’oeuvre. Il y a en sus des synthés évadés des films érotiques de la toute fin des années .’70, quelques réminiscences des tapis sonores qui furent la première incarnation de Deus : de ces morceaux où l’arpège se mélange à  l’overdrive, pour produire un son qui est ici sans aucune place pour la bavure.

Deus sort un album qui emprunte autant à  sa propre histoire, qu’au blues sautillant de G Love and the special sauce ou à  celui bruitiste et écartelé, de Jon Spencer. Et en se concentrant de la sorte sur ses forces, en se rassemblant via ses basiques derrière l’organe si reconnaissable de Barman et ses micros sixties, Deus sort un album où l’attention de l’auditeur est maintenu en haleine tout au long de l’écoute, sans baisse de régime. Une réussite et un réel plaisir d’écoute, c’est un constat que je n’ai pas fait depuis au moins deux opus. Deus fait du Deus, et soigne les détails. J.’aime.

Il ne manque finalement, pour que mon bonheur soit total, qu’au-delà  des mélodies accrocheuses que le groupe semble convoquer à  nouveau au détour de chaque titre, les divins Anversois ne (re)trouvent la voie définitive des enchaînement mnémotechniques, entêtants, qui font les chansons dont on bâtit les légendes. Parce que c’est la seule chose qui manque vraiment à  ce forgotten sea de très bonne facture. Un pincée de légende qui serait ici retrouvée en plus d’un savoir faire indéniable à  l’oeuvre aujourd’hui.

Denis Verloes

Tracklist

Label: Pias
Date de sortie: juin 2012

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