Motorama – Calendar

l’avenir de l’indie pop se dessinerait-il en partie en Europe de l’est ? Sans prophétiser outre mesure, force est de reconnaître le nez creux du label bordelais Talitres qui, après nous avoir révélé la pop lumineuse des Ewert And The Two Dragons venus d’Estonie, va encore un peu plus loin en nous offrant la pop venue du froid, celle des russes de Motorama.

Sur Calendar, leur deuxième album et premier à  être largement distribué en Europe (merci Mr, Sean « Talitres » , Bouchard), on est d’ores et déjà  en eaux familières, dans celles de la pop anglaise qui fit les belles heures de la décennie 80 :, format pop, basse et guitare galopantes, minimalisme cold, voix sépulcrale,, il est évident que Joy Division est la référence première qui saute aux oreilles.

Ne pourtant pas réduire le quintet de Rostov-sur-le-Don à  de paresseux imitateurs du Factory Sound. Si la voix grave et profonde de leur chanteur Vladislav Parshin, renvoie à  celle de Ian Curtis, la musique de Motorama appelle à  des paysages moins sombres et plus grand ouverts que celle des séminaux mancuniens. Une virée aérienne, aux couleurs pas si froides et menée tambour battant, mélange idoine entre romantisme new wave et pop ligne claire à  l’énergie sautillante. Un mix idéalement résumé par la pochette bleue de l’album, traversée d’un lac au grand air qu’emprunte aussi pour son plaisir l’auditeur.

Souple, joueuse et remplie d’arpèges de guitares limpides, la musique de Calendar les voit dépasser l’exercice de style ou de simple imitation qui n’aurait, sans cela, aucun intérêt. On aime déjà  ces lointains musiciens pour la vigueur avec laquelle ils reprennent un bagage musical connu et le recréent avec limpidité et enthousiasme. Le rythme métronomique (To The South, Young River), l’allégresse ondoyante de leur pop songs (Rose In A Vase, In Your Arms) et le délicat équilibre qu’ils conservent tout le long entre surf pop sixties éminemment dansante et distance cold parfois plus grave (During The Years), témoignent du talent avec lequel ces jeunes gens recréent avec affection les grandes heures de l’indie pop anglaise rêveuse des eighties.

Celle des Smiths et des légendaires guitares tricoteuses de Johnny Marr, mais plus encore de toutes ces formations post-adolescentes timides et fragiles de Sarah Records and co, de Felt à  Another Sunny Day en passant par St Christopher ou les indispensables The Fied Mice. Avec cet étonnant mélange de brume limpide et de douceur euphorique, le tout délivré avec modestie et naturel, sans aucune volonté tape-à -l’oeil, ou oreille plutôt.

Seul bémol au sujet de ce pourtant très bon disque :, on rétorquera à  juste titre de ne pas y entendre grand chose de neuf. La nouveauté, tel ne semble,  pas être le but recherché par Motorama mais perpétuer avec une belle fraîcheur l’esprit et les codes d’un indie rock toujours aussi revigorant. Dans la recherche des paradis sonores passés entreprise par certaines formations actuelles, nos russes rejoignent ainsi leurs collègues de l’est Ewert And The Two Dragons, les anglo-saxons de Beach Fossils ou les précieux suédois de The Radio Dept.

Mais réconcilier le passé et le présent avec goût, tout le monde ne peut pas en dire autant, : inscrivez donc sans tarder l’écoute de ce tonifiant russe à  votre calendrier.

Franck Rousselot

MotoramaCalendar
Label : Talitres / Differ-Ant
Date de sortie : 5 novembre 2012

À signaler : les EP et l’album précédents de Motorama sont en téléchargement gratuit sur leur site http://wearemotorama.com/audio