cinéma

Cache-cache de Yves Caumon

[2.0]

 

 

Cache-cache réussit la double performance, si l’on peut dire, d’épuiser son dispositif narratif en un quart d’heure et de ne jamais nous faire entendre la voix du personnage principal. Si la seconde caractéristique plus anecdotique tend à une singularité formelle, la première franchement plus discutable sape toute l’architecture du film.

 

Yves Caumon, signataire du prometteur Amour d’enfance, nous convie donc à une partie de cache-cache entre les nouveaux propriétaires d’une belle bâtisse fraîchement rénovée et l’ancien locataire des lieux, Raymond, garçon simplet et muet, solitaire abandonné, tenu pour mort pour la plupart des voisins et peu désireux de laisser sa place. L’arrivée des nouveaux occupants, la famille ex-citadine, idéale avec deux enfants et un chien, oblige Raymond à quitter la maison et à se cacher d’abord dans les endroits les plus farfelus pendant les travaux, puis au fond du puits, parfait observatoire des agissements des intrus. Car Raymond a un avantage, les nouveaux ne connaissent pas son existence et sont bien loin de se douter de cette étrange promiscuité. Alors la vie s’organise, rythmée par les activités diurnes et bruyantes des propriétaires et par les escapades nocturnes de Raymond vaquant à ses petites affaires : lavage de vêtements, alimentation.

Et c’est bien là que le bât blesse car très vite le film tourne en rond : bien sûr des signes de la présence d’un autre vite assimilé par les deux enfants à un fantôme vont bientôt apparaître. Le puits, l’asile de Raymond, suscite toutes les convoitises des gamins abasourdis de retrouver dans les endroits les plus incongrus les objets qu’ils y ont préalablement jetés.

La thèse du fantôme semble ainsi se confirmer, provoquant la crise de la mère et le trouble dans tout le clan et emmène trop tardivement le film sur les territoires du fantasque et de l’irréel.

 

Cache-cache se veut un conte et une allégorie sur le regard porté aux autres. Ici l’autre est différent et invisible, on pourrait dire inférieur, et le regard est unilatéral. Le message est d’autant moins nuancé et il est donc aisé de décrypter les intentions louables du réalisateur. Hélas, l’essai est loin d’être transformé et accumule les défauts. Pourquoi avoir fait des parents deux personnes hors de leurs pompes, aux attitudes apprêtées et artificielles ? On ne voudrait pas en aucun cas être soignés par le père, dentiste mollasson et on rêverait que la mère opte pour le mutisme comme Raymond. Tout cela est proche de la caricature et finit par amoindrir le propos humaniste.

Film rural et lent – ce qui en soi est tout à fait respectable mais flirte ici avec ringardise et niaiserie -, Cache-cache passe à côté de son sujet et demeure une gentille fable, qui devrait néanmoins recueillir les suffrages des plus jeunes ou des nostalgiques des jeux enfantins.

 

Patrick Braganti

 

Drame français – 1 h 31 – Sortie le 1er Février 2006

Avec Bernard Blancan, Lucia Sanchez, Antoine Chappey

 

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