cinéma

Intervention Divine d’Elia Suleiman     1/2

 

 

    L’avantage avec ce genre de film, qui d’ailleurs n’appartient à aucun genre en particulier, c’est qu’il permet aux critiques et aux spectateurs en général d'exprimer toutes les interprétations possibles et imaginables tant il est parait abstrait et métaphorique.

    Intervention divine n’est pas un film comme les autres c’est le moins qu’on puisse dire. Pas sa forme mais aussi sur le fond puisqu’il parle du conflit israélo-palestinien d’un point de vue humaniste à l’opposé, par exemple, d’un Michael Moore et de toute démonstration et autre explication à caractère politique ou diplomatique. Elia Suleiman traite son sujet avec un regard poétique, absurde et décalé sous la forme d’une sorte de chronique, comme un regard sur son monde détraqué qu’il l’entoure un peu à la manière de Moretti. Au hasard on croisera un type qui balance des bouteilles vides sur les flics qui viennent l’arrêter parce qu’il casse les routes, un autre qui attend un bus qui ne vient pas, un autre qui balance sans raison les poubelles chez sa voisine. Mais derrière ce désordre tranquille se cache le conflit représenté par un check point où l’on revient plusieurs fois parce qu’il constitue l’aspect le plus symbolique  du film. Notamment quand un ballon, à la l’effigie d’Arafat, passe par-dessus le check point sous le regard hébété des soldats pour aller se promener dans le ciel de Jérusalem, ou encore quand une plantureuse palestinienne, montée sur talons-aiguille, dans une parodie de pub, force le check point et fait s’écrouler au passage le mirador des gardes effarés.

    Certes on comprend la démarche, le point de vue de Suleiman, mais on a un peu de mal à le suivre dans ses détours et ses retours. Lors on se laisse porter, bon gré mal gré dans ses délires cinématographiques : voire cette scène, digne des meilleurs films de ninja (c’est-à-dire les plus nuls) où notre jolie palestinienne cette fois-ci déguisée Lee Van Cleef dans « l’homme au katana » déjoue les tirs d’hommes en armes avec agilité incroyable. En fait tout dans ce film, toutes les scènes, le plus souvent sans lien direct entre elles, engendrent inévitablement un questionnement.

    Alors évidemment, on peut trouver ça sublime, d’une incroyable pertinence ou bien au contraire rester de marbre devant un film qui, par sa froideur, son ton trop décalé, son humour grave n’arrive pas convaincre les plus incrédules, ceux qui ne croient pas aux rêves ou aux fantasmes d’un Elia Suleiman, aux partis pris de mise en scène, quoi qu’on en dise, très singuliers et assez rares pour être encouragés dans un cinéma en quête perpétuel de renouvellement.

    En tout cas, quoi qu’on en pense, et quelles que soient les impressions ressenties, le film a le mérite de susciter la réflexion, et d’apporter un point de vue inédit sur un conflit qui a fini par tomber dans la banalité et le quotidien tant celui-ci n’en finit pas de durer.

Patrick