cinéma

Steamboy de Katsuhiro Ôtomo       1/2

 

 

    À voir ce prodigieux Steamboy, on entend presque Katsuhiro Ôtomo nous dire : "Voilà ce qu’est le vrai cinéma d’animation !". Mais le but du réalisateur du fondamental Akira (1988) n’est pas de donner une leçon à ses collègues de l’animation. Ce serait réduire à néant la petite dizaine d’années de travail nécessaire à la réalisation de cette nouvelle œuvre. Outre le message de ses films, Ôtomo n’a jamais eu qu’un seul but : tirer le meilleur parti de la technologie et explorer de nouvelles voies pour offrir un rendu visuel unique et inédit. Totale réussite de ce point de vue. On ne compte plus les scènes où la performance technique coupe le souffle. Rarement le mélange animation classique et 3D aura atteint ce niveau de perfection.

 

    Ainsi équipé, Ôtomo peut nous présenter la famille Steam, dont tous les hommes, marqués du sceau de leur patronyme, consacrent leur vie à l’étude de la vapeur, dans l’Angleterre de la fin du XIXème siècle. Le professeur Lloyd et son fils Edward créent un ballon capable de garder une quantité presque inépuisable de vapeur à très haute pression. Le jeune Ray en devient l’héritier inopportun quand l’invention, pleine de promesses marchandes, attire trop de convoitises.

 

    La trame scénaristique de Steamboy n’est pas un modèle d’originalité. L’histoire est très prenante grâce au rythme soutenu de l’action, mais la plupart des thèmes sont déjà présents dans les précédents travaux du réalisateur japonais, même s’ils restent pertinents. Akira et surtout Metropolis (2001), de Rintaro mais dont Ôtomo a réalisé le scénario, font déjà appel à un personnage jeune, qui se retrouve soudainement investi du Pouvoir et ne sait quoi en faire : l’utiliser ou le confier (à qui ?). Ray Steam va donc faire le dur apprentissage de la vie et des apparences parfois (souvent) trompeuses, avant d’agir de son propre chef. Le poids symbolique de cette puissance est accru par le fait que l’on se trouve aux balbutiements de l’ère industrielle. La situation de Ray est celle des grandes nations qui, à l’aube du XXème siècle, se sont retrouvées en position de gouverner le monde et l’ont fait de façon plus ou moins pertinente et juste.

Difficile également de ne pas faire le rapprochement entre ce petit ballon métallique contenant des réserves infinies de vapeur et l’énergie nucléaire. Ôtomo s’attache cependant à nous montrer, dans un élan nostalgique et utopiste, que la vapeur, même hors de contrôle, reste inoffensive.

 

    Steamboy est une réussite majeure, comme le fût Akira en son temps (même si ce dernier n’a pas pris une seule ride), sur tous les plans : réalisation technique, musique, rythme, réalisme presque maniaque, etc... Pour ne rien gâcher, le générique de fin est des plus brillants. Et, du point vue du calendrier, ce nouveau long métrage ne pouvait mieux tomber, à savoir avant l’arrivée de deux autres poids lourds de l’animation : Ghost in the Shell 2 : Innocence de Mamoru Oshii et le prochain film d’Hayao Miyazaki, Le Château du magicien. Que demander de plus ?

 

Sébastien Raffaelli

 

Film japonais - 2h 06 - Sortie 22 Septembre 2004

Avec Kiyoshi Kodama, Manami  Konishi, David  S. Lee, Anne Suzuki, Katsuo Nakamura...