musique

Emilie Simon - Végétal

Barclay/Universal

[4.5]

 

 

Avec un premier opus Le désert primé par une Victoire de la musique électro et un faux second, en forme de B.O. également primé, on se dit que le parcours d’Emilie Simon a tout de la success story à la française. On attendait donc le nouvel album avec impatience, histoire de voir comment elle réussirait à se dépatouiller avec une certaine « pression » qui a perdu plus d’un musicien dans l’histoire de la musique. En fait disons le d’emblée… carrément avec les honneurs !

 

On a souvent comparé miss Simon à un manchot : mais ce sont sans doutes des propos de jaloux, qui ont eu du mal à digérer le spectacle du film la marche de l’empereur, dont elle a composé la BO primée. On a aussi souvent comparé Emilie Simon à une Bjork hexagonale. Et la référence n’est pas tout à fait inepte, même s’il faut dans ce cas remonter plutôt aux deux premiers albums de l’Islandaise, plus qu’à ces productions expérimentales plus récentes. Soit le mélange entre une voix féminine qui assume son originalité, et une électronique bien troussée, qui tente, hésite, tâtonne ou maîtrise, dans le but de créer un petit univers autarcique.  A ce petit jeu d’univers personnel et autonome, Emilie Simon remporte haut la main les suffrages. Sa voix, qui hésite entre le naïf et le narquois fait mouche sur une électronique qu’on sent qu’elle domine mieux d’album en album et ses inflexions nous rappellent une malheureuse concurrent de la machine de guerre Björk : Ruby, pour ceux à qui le nom évoquerait encore quelque chose.

 

Ce petit monde scruté à la loupe par Emilie Simon, elle l’appelle végétal. Un microcosme vert, sombre, où l’électronique arpente le versant pop (de la plus poétique acception à son côté le plus « rock ») où on croise, outre la programmation, du  chant bien sûr, ou encore des guitares, de la batterie, des percussions, un piano, un rhodes, du senza, des bouteilles, un vibraphone, un marimba, une basse, une human beat box, un violon, un alto, un violoncelle, une flûte… mais aussi semble-t-il des froissement de feuilles et des bruissements de vent dans les branches. Un univers musical complexe et recherché dont le résultat sonne diamétralement et simplement pop donc ultra-accessible.

 

Mais cette petite planète n’est pas faite que de musique. Les textes y brillent par leur côté poétique et leur jolie fatalité, leur ironique mélancolie, leur faux air romantique. A l’instar du camée ornant la pochette, représentant Emilie, ses histoires semblent écrites par un Lamartine ou un Musset alors qu’elles sont en fait l’œuvre d’un démiurge narquois, contemporain, à la plume affûtée –mention spéciale à la musicalité des paroles et au choix des mots- disciple, peut-être, de quelque Tim Burton ou équivalent.

 

Pour quelque raison non clairement identifiable on a comparé ce végétal, où les gens sont des fleurs et où les actions semblent s’inscrire dans un cadre biologique précis qui influerait sur la vie des protagonistes, au film Angels and insects de Philip Haas . Là les gens étaient et agissaient comme des choléoptères. Ici les filles sont fleurs.

Le résultat est un subtil mélange de poésie, de romantisme, de grande qualité d’écriture, de chant très identifiable, de maîtrise des machines sans surcharge, d’esthétisme… gardant toujours sa cible en vue : la pop musique ; évitant du même coup l’écueil du disque intello pour intellos. A découvrir sans tarder.

 

Denis Verloes

 

Tracklist :

01. Alicia

02. Fleur de saison

03. Le vieil amant

04. Sweet blossom

05. Opium

06. Dame de lotus

07. Swimming

08. In the lake

09. Rose hybride de thé

10. Never fall in love

11. Annie

12. My old friend

13. En cendres

 

Durée50’ 05’’

Date de sortie : avril 2006

 

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La fiche de Angels and insect sur l’IMD