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                         Aaron
                        Mc Gruder - The Boondocks t.
                        1   
                        Dargaud
                        - 2003 
                          
                          
                          
                          
                           
                        The boondocks (littéralement : quartier ennuyeux)
                        est sans doute le comic strip américain le plus ébouriffant
                        de ses dernières années. La série fut créée sur
                        internet en 1996, avant de trouver le succès auprès de
                        plus de 200 quotidiens américains. C'est Dargaud qui
                        s'y colle pour nous amener en français, dans une
                        traduction impeccable de Jean-Paul Jennequin, les
                        frasques de Huey et Riley Freeman, deux gamins noir américains
                        soudain transplantés d'un ghetto de Chicago dans une
                        banlieue bourgeoise blanche. 
                         
                        
                         
                           
                        Huey, c'est la conscience politique. Coiffé à l'afro
                        et doté d'une maturité étonnante pour son âge, il a
                        l'âme révolutionnaire bien trempée. Son petit frère
                        Riley est à l'opposé. Fasciné par le gangsta-rap, il
                        ne rêve que d'imposer sa loi dans le quartier. Foutre
                        le feu est l'objectif de nos deux gaillards, mais d'une
                        manière bien différente et avec des moyens qui, à
                        leur âge, ne sont à leur grand désappointement pas
                        toujours à la hauteur. Parce que le grand-père, qui en
                        a vu d'autres, veille au grain. Bientôt, d'autres
                        figures viennent se greffer au récit, tel ce couple
                        mixte (un noir marié à une blanche) et leur fille métisse
                        ou encore une petite fille blanche pour qui l'arrivée
                        de noirs dans le quartier est le summum de l'exotisme. 
                         
                        
                         
                           
                        Mc Gruder en profite pour caractériser les différentes
                        tendances agitant la communauté afro-américaine,
                        tiraillée entre désir d'assimilation (le gentil noir
                        blanchi marié avec une blanche), honte de soi (la
                        petite métisse qui refuse ses cheveux crépus),
                        marginalisation dans la violence (l'idéal du gangster
                        de Riley) et communautarisme militant (l'engagement de
                        Huey), le tout dans un environnement où les relations
                        entre races s'avèrent toujours très problématiques.
                        C'est rempli de détails savoureux, de références
                        musicales, de références culturelles et politiques
                        purement américaines mais admirablement explicitées en
                        notes de bas de page sans que la lecture en soit gênée. 
                         
                        
                         
                           
                        La grande réussite de Mc
                        Gruder est de parvenir à être incisif, caustique,
                        sans aucune concession, à pointer avec beaucoup
                        d'intelligence une plume au vitriol là où ça fait mal
                        sans jamais rien sacrifier à la drôlerie de ses strips.
                        Parce qu'avant tout, The
                        boondocks n'oublie jamais d'être irrésistiblement
                        drôle. 
                         
                        
                         
                           
                        Dans le deuxième volume, on devrait voir Huey et Riley
                        entrer à l'école primaire du quartier, la J.Edgar
                        Hoover School. Tout un programme. Avec un professeur
                        qui, pour accueillir le premier élève noir de sa carrière
                        et s'acclimater à la culture noire américaine,
                        visionne une pile de vidéos blaxploitation, on ne
                        devrait pas s'ennuyer. 
                        Du
                        militantisme à la sauce Mc
                        Gruder, on en redemande.
                          
                         Fred
                          
                          
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