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                               Breccia
                              - Les mythes de Cthulhu 
                               1/2 
                              Rackam
                              - 2004 
                                
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                        Il y a quelques mois, on vous parlait de l'excellent Cauchemars
                        et on en profitait pour brosser un rapide portrait de
                        son auteur Alberto
                        Breccia. Aujourd'hui, avec ce recueil d'adaptations
                        de nouvelles de Lovecraft,
                        Rackham poursuit l'exhumation des œuvres essentielles
                        de ce génie de la bande dessinée. Une nouvelle fois,
                        c'est un album splendide qu'il nous est donné de découvrir. 
                         
                        
                         
                           
                        Breccia a
                        consacré trois années à la réalisation des histoires
                        composant cet album. De 1972 à 1975, il s'est
                        totalement immergé dans l'univers de Lovecraft, le célèbre écrivain de fantastique créateur d'un
                        univers profondément personnel reposant sur une
                        conception très perturbée et morbide de la peur
                        primale et de l'angoisse. La représentation graphique
                        de cet univers est une gageure. De nombreux auteurs, en
                        bande dessinée et au cinéma, s'y sont embourbés sans
                        parvenir à convaincre. Tel n'est pas le cas de Breccia. 
                         
                        
                         
                           
                        Contrairement à Cauchemars
                        et ses évocations très libres de nouvelles de Poe et d'une poignée d'autres auteurs, Breccia choisit ici de rester fidèle aux textes (même s'il les
                        condense) et aux déroulements originels des récits
                        qu'il adapte. Cette fidélité constitue le point de départ
                        d'une vertigineuse réflexion sur les possibilités de
                        représentation graphique de l'indicible, de
                        l'innommable lovecraftiens. Pour parvenir à ses fins, Breccia
                        ose toutes les audaces. Il multiplie et mixe les
                        techniques les plus diverses (collages, cartons découpés,…)
                        dans un feu d'artifices expérimental qui ne perd jamais
                        de vue le matériau narratif de base et donne forme aux
                        visions obsessionnelles et oppressantes de Lovecraft
                        avec une puissance unique. Breccia réussit pleinement le tour de force qui consiste à coller
                        au plus près aux atmosphères lovecraftiennes tout en
                        adoptant un style profondément personnel et original. 
                         
                        
                         
                           
                        Les mythes de
                        Cthulhu se présente donc comme une expérience
                        double. D'une part, l'album permet de redécouvrir,
                        transfigurés, les textes majeurs de Lovecraft que sont Le
                        cauchemar d'Innsmouth, L'abomination
                        de Dunwich, La
                        cité sans nom, Celui qui chuchotait dans les ténèbres ainsi que quelques autres.
                        D'autre part, il porte également en son sein la
                        possibilité de suivre Breccia dans sa quête inlassable
                        et profondément expérimentale d'une forme renouvelée
                        qui, dans un même mouvement sert et détermine le fond. 
                         
                        
                         
                           
                        Il est permis de préférer les œuvres de Breccia plus
                        directement ancrées dans une représentation décalée
                        du monde qui l'entoure (Perramus,
                        Dracula, Che), il n'en
                        reste pas moins que Les
                        mythes de Cthulhu reste un jalon essentiel dans l'évolution
                        de l'expression de son art. Cette considération à elle
                        seule, et elle n'est de toute évidence pas du tout la
                        seule qui puisse être émise en faveur de l'album,
                        justifie amplement l'acquisition et la lecture de ce
                        splendide joyau noir. 
                          
                        Fred  
                          
                          
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