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                         Gnaedig
                        & Thirault - Vider la corbeille  
                          
                        Rakham
                        - 2003 
                          
                          
                          
                          
                           
                        Parmi la pléthore de créations de mondes imaginaires,
                        de récits de genre et même de bandes dessinées du
                        quotidien, les albums mettant en scène le monde du
                        travail, et l'entreprise en particulier, ne sont pas légion.
                        Vider la corbeille
                        déroge à la règle, et mieux encore, transforme
                        l'essai en vraie belle réussite.
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        Les auteurs ont choisi 
                        de placer l'action dans le milieu des employés
                        et de la direction d'une entreprise qui commercialise
                        des feux ouverts, cheminées, 
                        pour salon kitschissimes (ne pas rater les
                        hilarantes descriptions détaillées des modèles en fin
                        d'album).
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        Même si on pourra juger le dessin assez fruste, force
                        est de constater qu'il donne une clarté remarquable à
                        un récit d'une fluidité exemplaire. Il met en outre en
                        place de nombreux lieux et personnages tout en 
                        dégageant la complexité des flux liés au
                        fonctionnement d'une entreprise.
                        
                         
                        Personnage
                        central du récit, Stanislas vient d'être engagé comme
                        stagiaire à la distribution du courrier, tâche privilégiée
                        pour nouer des contacts avec l'ensemble du personnel et
                        observer le mode de fonctionnement des services. Il
                        rencontre une galerie de personnages, tous plus vrais
                        que nature, typés sans qu'ils soient limités à la
                        caricature et présentés sans fards.
                        
                         
                        Tout
                        au long de l'album, les dialogues sonnent avec une
                        justesse implacable. Les situations sont croquées avec
                        une ironie caustique qui n'épargne rien de
                        l'hypocrisie, des médisances, de la veulerie, de la médiocrité
                        et des abus de pouvoir de personnages pris dans la
                        routine ainsi que la banalité d'un travail de bureau où
                        la plus intéressante distraction est d'aller dénicher
                        la merde chez le voisin pour le voir s'y empêtrer.
                        
                         
                        Et
                        en plus, c'est très drôle…
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        Pas question ici, bien évidemment, de divulguer la fin
                        du récit mais la manière brillante et pleine de
                        naturel avec laquelle Gnaedig
                        et Thirault bouclent leur histoire en ramassant les cartes pour les
                        redistribuer de manière inattendue selon une nouvelle
                        donne,  ajoute
                        une dimension supplémentaire à l'album. En quelques
                        planches, on est passé du rire grinçant au rictus figé,
                        on est passé de la banale et très humaine médiocrité
                        des individus au cynisme d'un système qui broie tout
                        selon une cohérence interne qui n'a que faire de l'élément
                        humain.
                        
                         
                        Et
                        on sait désormais où est la vraie indécence…
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        Toutes proportions gardées, sous certains aspects, on
                        pense au remarquable film Ressources
                        humaines de Laurent
                        Cantet et on se dit que ce Vider
                        la corbeille est décidément un foutu bon album.
                        
                        
                        
                        
                         
                        Fred
                        
                         
                          
                          
                          
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