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                               Akimi
                              Yoshida - Banana Fish   
                                
                              Génération
                              Comics – 192p, 6,95 € - 2002/2004  
                              (12
                              tomes parus sur 19 prévus) 
                                
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                        Ash Lynx est un jeune caïd de New York, à la fin des
                        années 1980, à la fois terriblement intelligent et très
                        séduisant, et se trouve être le petit protégé de
                        Dino Golzine, chef local de la mafia Corse. En cherchant
                        ce qui a bien pu rendre son frère fou pendant la guerre
                        du Viêt-Nam, il se trouve alors mêlé à l’affaire
                        du « Banana Fish ». Cette expression mystérieuse
                        que son frère ne cesse de mentionner va le pousser à découvrir
                        l’existence de projets insoupçonnés, en compagnie
                        d’un jeune japonais, Eiji.
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        La trame scénaristique de Banana Fish semble au
                        premier abord s’apparenter à celle d’un polar tout
                        à fait classique. Mais l’œuvre contient un certain
                        nombre d’ingrédients qui lui donnent un relief et un
                        charme particuliers. Tout d’abord, le dessin est
                        d’une grande finesse, notamment dans les derniers
                        tomes parus, jusqu’à devenir franchement superbe. En
                        dépit du choix original de l’éditeur français de
                        publier l’œuvre sur un papier jaune (en rapport avec
                        le titre, bien entendu), l’auteur arrive parfaitement
                        à rendre compte des émotions véhiculées par ses
                        personnages, en usant notamment fortement des gros plans
                        et d’un découpage classique mais efficace.
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        Ensuite, si l’auteur sait y faire pour construire son
                        histoire, et entraîner son lecteur dans moult péripéties
                        et rebondissements, elle sait avant tout rendre ses
                        personnages diablement attachants. En effet, Ash est
                        sans doute l’un des héros de bande dessinée les plus
                        fascinants et les plus charismatiques. L’auteur réussit
                        à son encontre à éviter la plupart des clichés
                        habituels qui caractérisent les jeunes chefs de gangs
                        à l’enfance chaotique. Surtout, l’œuvre prend
                        toute sa dimension en nous exposant la complicité
                        naissante d’Ash et d’Eiji, le jeune japonais qui se
                        retrouve à New York un peu par hasard, pour essayer de
                        se reconstruire. Les deux personnages se lient alors
                        d’une amitié très forte, presque fusionnelle, où
                        les non-dits, les regards, les attitudes ont une
                        importance considérable. Le fait que l’auteur soit
                        une femme et que l’œuvre ait été au Japon d’abord
                        publié à l’intention d’un public féminin (même
                        si elle s’adresse bien entendu à tout le monde) y est
                        certainement pour beaucoup.
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        Au-delà des dénonciations du rôle souterrain et
                        obscur de l’armée américaine dans le déclenchement
                        des coups d’’Etat en Amérique du Sud, de la
                        collusion entre certains hommes politiques et le milieu
                        mafieux, Akimi Yoshida semble avant tout vouloir
                        mettre en scène des personnages cherchant à échapper
                        à tous les déterminismes, qu’ils soient sociaux,
                        ethniques, communautaires, ou encore liés à la couleur
                        de peau ou à la nationalité, à l’éducation ou à
                        l’enfance, voire plus explicitement au contrôle même
                        du cerveau d’autrui. En cela, Banana Fish se présente
                        avant tout comme un formidable hymne à la liberté, à
                        la coexistence, et à l’arrachement à tous les
                        blocages et déterminismes, dont le « Banana Fish »
                        en est en quelque sorte le stade extrême, l’allégorie
                        la plus monstrueuse.
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        Œuvre mal aimée du public francophone, Banana Fish
                        mérite pourtant amplement votre attention, en sachant
                        toutefois qu’il faut certainement plusieurs volumes
                        avant que le plaisir ne devienne irrésisitible. Non dénué
                        d’un humour rafraîchissant, sentant bon les années
                        1980, alternant les scènes d’actions jouissives et
                        les scènes plus contemplatives, elle possède véritablement
                        tous les ingrédients pour séduire chaque public, même
                        le plus exigeant.
                        
                         
                         
                        
                         
                        Vincent
                        Monnoir 
                          
                        Plus+ 
                        L'éditeur
                        : Génération
                        comics 
                          
                          
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