| 
                               Schuiten
                              & Peeters - La frontière invisible
                              t .2   
                              Casterman
                              - 2004 
                                
                             | 
                           
                          
                            | 
                              
                             | 
                              | 
                           
                          
                            | 
                                 
                             | 
                           
                         
                         
                        
                           Avec
                        le second tome de la frontière invisible le duo
                        de dessinateurs belges met fin aux années « cités
                        obscures ». La frontière invisible de Sodrovno
                        Voldachie sera donc 
                        le dernier espace des contrées des cité
                        obscures que le tandem décide d’explorer au travers
                        de sa narration. L’événement fait date pour un duo
                        scénariste/ dessinateur qui a fait déborder
                        l’univers de ses bandes-dessinées, loin au delà des
                        seules pages des tomes. C’est donc avec une pointe
                        d’émotion qu’on se prépare à quitter un 
                        univers complet fait d’éléments urbains et de
                        valorisation de l’Art Nouveau dont les deux hommes se
                        sont fait les chantres loin au delà des frontières du
                        petit royaume.
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        Et pour le final de la série, on retrouve le jeune émoulu
                        cartographe Roland De Cremer reprenant son poste 
                        au centre de cartographie de Sodrovno Voldachie.
                        Là, il croit retrouver le travail scientifique,
                        rigoureux, complètement pointilleux, à la limite du
                        trouble obsessionnel de son chef de service et mentor.
                        Un monsieur Paul chargé d’établir un relevé à l’échelle
                        et en trois dimensions des territoires frontalier de la
                        grande Sodrovnie… Il retrouve au contraire un centre
                        sommé d’arriver à de rapides résultats, où
                        l’empressement nuit à la rigueur scientifique, où
                        l’ordinateur balbutiant et hasardeux fournit des données
                        expérimentales étranges et pourtant utilisées. Une
                        fourmilière où agissent dans l’ombre de sombres
                        passions desservant les desseins expansionnistes d’un
                        maréchal national avide de conquêtes et de nouveaux
                        territoires. Dans cette agitation plutôt malsaine, De
                        Cremer se rend compte que sa jeune amante Shkodrà
                        semble porter sur les fesses une étrange tâche de vin
                        qui ressemble comme deux gouttes d’eau au trajet sans
                        doute véritable de la nation prête à son anschluss
                        guerrier. S’ensuit une quête où se mêle raison
                        politique souvent absurde ou non fiable, credos de
                        cartographe et… amour. Equation à trois inconnues qui
                        trouve sa résolution au fil de l’album.
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        Depuis l’ombre d’un homme, Benoît Peeters
                        fait prendre à la série un tour plus humain. Il tente
                        de mettre au fin aux critiques de « froideurs
                        d’architecte » que certains reprochaient aux
                        premiers opus des Cités. Il faut malheureusement
                        avouer que l’ « ananké », ce destin
                        immuable et tragique qui soufflait dans les hugoliennes
                        pierres de Notre Dame de Paris par exemple,
                        convenait mieux à la série. 
                        La présence insistante des pierres et des
                        villes, peine à trouver un écho quand le centre de
                        gravité se déplace du lieu aux hommes. Et ce n’est
                        pas ce final qui viendra modifier la donne, quand bien même
                        il faut constater que le dessin de Schuiten a
                        acquis une maestria certaine dans la composition
                        de lieux –mais on s’en doutait déjà- ; et
                        aussi dans l’usage de cette ligne claire désormais
                        beaucoup plus riche et humaine à peindre les hommes et
                        les femmes. A peine lui manque-t-il sans doute un coup
                        de crayon qui permette de rendre l’atmosphère des
                        situations… Une atmosphère qui pêche beaucoup au fil
                        de l’album et rend l’intrigue un peu distante :
                        en fait, on ne s’y implique jamais. C’est
                        regrettable… car La tour, ou 
                        Brusël double inquiétant et onirique de
                        la capitale belge, réussissaient à attraper le lecteur
                        dans leur ciment, là où l’amour de de Cremer et
                        Shkodrà semble bien lisse. Peut-être l’histoire
                        d’expansion de pays balkan-isant, en proie aux
                        nationalismes, aux conflits de clocher foncièrement
                        ridicules vus de Sirius et à une sous jacente barbarie 
                        eût-elle gagné en ampleur et en grandiloquence
                        si la focalisation s’était faite sur le point de vue
                        de la capitale Galatograd ou du centre de cartographie
                        lui-même… Le chroniqueur se perd en suppositions
                        inutiles, un peu déçu en refermant ce deuxième tome :
                        non seulement il met fin à une histoire qui promettait
                        plus qu’elle n’a finalement donné, mais aussi il
                        voit, avec la clôture du cycle, la fin d’une aventure
                        qui l’a amené du lycée à l’âge adulte. A bientôt
                        donc pour d’autres formes d’aventures ?
                        
                         
                          
                        Denis 
                          
                          
                        
                        
                          |