| 
                               J’ai
                              vu tuer Ben Barka de
                              Serge Le Péron  
                              [4.0] 
                             | 
                           
                          
                            | 
                              
                             | 
                              | 
                           
                          
                            | 
                                 
                             | 
                           
                         
                         
                           
                        Il y a tout juste quarante ans avait lieu à
                        Paris l’enlèvement de Mehdi Ben Barka, leader
                        marocain charismatique de la Tricontinentale
                        organisation regroupant les gouvernements des nouveaux
                        pays indépendants et les représentants des mouvements
                        de libération des trois continents : Afrique, Asie
                        et Amérique Latine. Début 1966, doit se tenir à Cuba
                        la première réunion de l’organisation, provoquant
                        l’inquiétude et la colère des Américains, dont le
                        Maroc constituait alors la tête de pont pour la
                        surveillance du continent africain, illustrée par
                        l’encadrement des services secrets autochtones par la
                        CIA. 
                        Devenu
                        persona non grata et gênant, Mehdi Ben Barka est piégé
                        à Paris en Octobre 1965 dans un épisode de sinistre mémoire
                        qui faillit ébranler le pouvoir français, sur lequel
                        planèrent longtemps secrets, mystères et rumeurs.
                        L’affaire Ben Barka mêla des hommes politiques, des
                        truands, des agents secrets et des intellectuels de
                        renom au milieu desquels Georges Figon, journaliste hâbleur
                        et séducteur, sans scrupules et sans envergure, devenu
                        l’instrument majeur de l’affaire.
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        C’est donc Georges Figon le pivot central du
                        film de Serge Le Péron, documentariste de renom
                        et auteur du déjà remarqué L’affaire Marcorelle
                        (2000). Cet arriviste attiré par le monde interlope des
                        voyous, toujours en quête d’un nouveau coup pouvant
                        lui rapporter gros, se trouve justement contacté pour
                        produire un film sur la décolonisation, mis en scène
                        par Georges Franju, écrit par Marguerite Duras, sur les
                        conseils et la haute bienveillance de Ben Barka. Ce
                        projet est en fait un leurre, servant d’appât pour
                        faire venir l’homme politique à Paris et organiser
                        son rapt et son assassinat.
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        J’ai vu tuer Ben Barka est un petit
                        bijou qui nous ramène vers une époque trouble et par
                        la même occasion au cinéma classique des années 50 et
                        60. Dans un Paris glacial, nimbé de lumière froide,
                        nous suivons sur un rythme d’enfer les pérégrinations
                        et manigances de Figon, une grande gueule vite dépassée
                        par les événements, pantin entre les mains de
                        redoutables services secrets. Plus que d’apporter une
                        lumière nouvelle sur l’affaire – notamment
                        l’influence de la CIA – , le film s’attache à
                        reconstituer un climat et une ambiance au-delà même de
                        l’époque, juste soulignée par quelques accessoires :
                        automobiles principalement. Serge Le Péron
                        propose une mise en scène efficace scandée par une
                        bande-son jazzy en diable. Une musique qui s’écoute
                        alors dans les caves enfumées de Saint Germain, à
                        laquelle Figon est nourri depuis les années 50, dont le
                        côté blafard colle à ses propres activités.
                        
                         
                          
                           
                        Le
                        film est servi par un casting exemplaire et surprenant. Charles
                        Berling est plus que convaincant dans le rôle de
                        Georges Figon pour lequel il a accepté de se grimer et
                        de se dégrader visuellement. Il rend le personnage équivoque
                        dans sa séduction et sa faconde. Jean-Pierre Léaud
                        compose un Franju à l’hallucination contenue et
                        douloureuse. Et Josiane Balasko fait une
                        prestation honorable empreinte de sobriété et de
                        sensibilité dans sa composition de Marguerite Duras.
                        
                         
                         
                        
                         
                           
                        Ce n’est pas faire injure à Melville en
                        convoquant sa mémoire comme référence logique à J’ai
                        vu tuer Ben Barka, film jouissif et documenté au
                        dynamisme sec et efficace.
                        
                         
                         
                        
                         
                        Patrick
                        Braganti
                        
                         
                         
                        
                         
                        Film
                        Français – 1 h 41 – Sortie le 2 Novembre 2005
                        
                         
                        Avec
                        Charles Berling, Simon Abkarian, Josiane Balasko,
                        Jean-Pierre Léaud 
                          
                        >
                        Réagir
                        sur le forum cinéma 
                          
                          
                         
                        |