cinéma

The Edukators de Hans Weingartner1/2

 

 

    En Allemagne, trois jeunes gens idéalistes et un poil révolutionnaires partagent galères quotidiennes, squat, amour et amitié et un point de vue commun sur la société actuelle penchant nettement sur les thèses anti-mondialistes. La jolie et blonde Jule tente de convertir par des actions commando dans les boutiques les acheteurs irresponsables des baskets fabriquées par des gamins asiatiques, tout en supportant un boulot de serveuse qui devrait lui permettre de rembourser une grosse dette. De leur côté, les deux potes Jan et Peter, le petit ami de Jule, réunis dans une association baptisée The Edukators se sont spécialisés dans le repérage de villas des riches quartiers qu’ils infiltrent en l’absence de leurs propriétaires. Point de cambriolage, juste une nouvelle et surprenante disposition des objets et des meubles et l’avertissement suivant : « Les années de vache grasse sont révolues », laissant entrevoir des lendemains qui déchanteront.

Tout cela dans un esprit naïf et bon enfant, jusqu’au jour où une visite nocturne se solde par le retour opportun de l’occupant des lieux. Pris de panique, le trio décide de kidnapper l’homme et de le cloîtrer dans un chalet de haute montagne inoccupé en attendant de trouver la solution.

 

    Le premier défaut du film est sa longueur car, avant d’en arriver à son sujet principal : le kidnapping et la cohabitation des trois ravisseurs et leur otage, il nous a fallu supporter un rapprochement fastidieux et sans surprise entre le solitaire Jan et la déterminée Jule pendant l’absence de Peter parti passer quelques jours à Barcelone. Toute cette partie laborieuse nous conduira à la conclusion très machiste qu’une belle nana finit toujours par semer la pagaille entre deux potes.

Ce traitement à la naïveté désarmante serait acceptable s’il ne nous fallait pas supporter une seconde partie confondante de mièvrerie, de démagogie et d’un manque de regard cruel. Figurez vous que l’industriel riche et adipeux embarqué vers ces cimes bucoliques et aérées fut lui-même un jeune – et svelte ? - révolutionnaire, épris d’idéaux, de substances en tout genre, même d’amour libre abondamment pratiqué dans sa communauté d’alors. En presque total accord avec le trio, mis à part son enlèvement, il se montre conciliant et coopératif : bon cuisinier, il n’est jamais contre un conseil judicieux, un avis circonstancié et partage volontiers une bière ou…un joint. A un moment, on craint que le séjour alpin – les vacances ? – tourne à la partouze généralisée. Car comme si cela ne suffisait pas, le réalisateur nous balance sa propre version Jules et Jim de son trio de joyeux drilles.

 

    Trop convenu et superficiel, frisant parfois le manichéisme le plus facile, et malgré des acteurs généreux et convaincants, mais aussi qui se la jouent beaux gosses, The Edukators provoque les éclats de rire des spectateurs indulgents. Des bonnes intentions aussi louables soient-elles ne suffiront jamais à faire un bon film. Sur ce thème des rapports troubles entre ravisseurs et otage, de l’engagement politique, on (re)verra avec plaisir l’excellent Buongiorno Notte, qui avait l’immense avantage d’être l’œuvre d’un cinéaste possédant talent et point de vue.

Le cinéma germanique à part quelques exceptions continue à manquer de subtilité et de profondeur. Reste l’espoir…

 

Patrick Braganti

 

Allemand – 2 h 07 – Sortie le 2 Février 2005

Avec Daniel Bruhl, Julia Jentsch, Stipe Erceg

 

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