cinéma

Hellboy de Guillermo del toro   1/2

 

 

    Hellboy, « garçon de l’enfer », le nom s’impose de lui-même pour cette petite créature rouge au bras droit surdimensionné et tirée d’une dimension parallèle par l’armée nazie qui cherche là son dernier salut, aidée de Raspoutine, en 1944. Récupéré par le gouvernement américain, le démon fait aujourd’hui partie d’une équipe d’intervention spécialisée dans le paranormal, en compagnie d’un homme-poisson télépathe et, par moments, d’une jeune femme pyrokynétique

 

    Après From Hell et La Ligue des Gentlemen extraordinaires, Hellboy est le troisième comic-book intelligent – osons le terme - à être adapté au cinéma. Intelligent non pas dans le sens où les X-Men, Spider-Man et autres Superman sont bêtes ; tout dépend du talent des différentes équipes qui les réalisent. Mais dans le sens où ces trois œuvres sont de vraies réalisations artistiques, placées hors du rythme de production commercial de la masse, avec un parti pris graphique, une richesse et une originalité scénaristique rarement égalés.

 

    Si la version grand écran de From Hell a laissé une bonne impression, la tragique Ligue des Gentlemen extraordinaires pouvait faire craindre le pire concernant Hellboy. Seuls deux noms, ceux qui ont permis au film de se faire, pouvaient nous laisser espérer quelque chose de grand. Il s’agit de Guillermo del Toro et de Ron Perlman, qui en sont à leur troisième collaboration. Mettre en scène cette bande-dessinée était le rêve du réalisateur, qui a imposé Ron Perlman pour le rôle-titre.

 

    Pari réussi de ce côté. Le trop rare acteur américain incarne, au sens étymologique du terme, cette montagne de muscles rouge à la répartie cinglante, qui se lime les cornes « pour mieux s’intégrer », avec son imperméable, sa main droite gigantesque et son revolver non moins énorme dans la gauche (un plan du film inverse les deux, ce qui est honteux). Pour son premier premier rôle, difficile de faire mieux de la part de Perlman. Il est d’ailleurs le symbole de la grande réussite de ce film : ses personnages. Cette galerie de monstres est maîtrisée de façon très efficace par le réalisateur, qui a pour l’instant consacré son œuvre cinématographique au surnaturel. De l’homme-poisson aux Chiens de l’Enfer, de la femme pyrokynétique au tueur nazi, véritable arme vivante, tous possèdent leur charisme propre et ont leur moment de gloire dans le film. Seul le personnage de Raspoutine est à la traîne, ressemblant plus au Cypher du premier Matrix en manteau de fourrure qu’au maître de l’occulte russe.

 

    La qualité du reste du film est plus aléatoire. Le scénario, sans être confus, marche sur une jambe et Guillermo del Toro nous force à avaler une grosse partie de l’univers pourtant singulier du comic-book avec un entonnoir. Le gros point faible de Hellboy réside dans sa fin, ce qui est un sacré problème. Le dénouement sentimental a déjà été vu ailleurs et de façon plus convaincante. Et, sans vouloir réclamer systématiquement un bouquet final dans les films à effets spéciaux, la dernière scène d’action laisse sérieusement à désirer tant au niveau scénaristique qu’esthétique.

 

    Malgré tout, Hellboy se place bien au-dessus de la mêlée des films fantastiques. L’implication, l’application et la volonté de Guillermo del Toro y sont pour beaucoup. L’ambiance diffusée tout au long du film, sorte de parenthèse gothique dans le flot du monde moderne, a son charme. Une suite est déjà programmée pour 2006 : croisons les doigts !

 

Sébastien Raffaelli

 

Etats-unis – 2 h 02 – Sortie le 11 août 2004 

Avec Ron Perlman, John Hurt, Selma Blair, Rupert Evans, Jeffrey Tambor