cinéma

L’Italien de Andrei Kravchuk

[3.0]

 

 

L’Italien, c’est le surnom donné à Vania, un gamin de six ans, pensionnaire d’un orphelinat russe qu’un couple italien veut adopter et emmener dans leur lointain pays, riche et ensoleillé. Ce que n’est certainement pas la région où Vania a vécu jusqu’à présent : une région de désolation, enfouie sous la neige et la boue, peuplée d’habitants miséreux qui tentent de survivre. Comme le font tous ces enfants, certains très jeunes – Vania et ses copains – d’autres déjà grands adolescents, ersatz de grands frères, protecteurs et éducateurs, organisant à l’intérieur de la chaufferie qu’ils ont investie des trafics clandestins et parallèles auxquels tous, jeunes et moins jeunes, contribuent.

D’une telle tristesse et d’un avenir si incertain, on pourrait aisément croire que Vania veuille s’extraire rapidement et sans regrets. Mais le petit garçon est saisi d’un doute : et si jamais sa mère naturelle venait un jour le récupérer. Il décide alors de partir à sa recherche, semant derrière lui la panique et le désordre, provoquant une poursuite effrénée du directeur de l’orphelinat, accompagné de « Madame », une femme d’affaires tout en rondeurs et en bijoux, à la tête du fructueux marché des adoptions.

 

Inspiré malheureusement d’un fait réel, L’Italien est à la fois un constat sans fioritures, à travers le prisme d’un lieu et d’une trajectoire particulière, d’un pays en décomposition et un conte poétique. Selon l’inclination de chacun et l’âme d’enfant qu’il a conservée, on appréciera davantage l’une ou l’autre des deux parties de L’Italien. L’orphelinat, dirigé par un homme bon et visiblement dépassé par les événements, est une espèce de cour des miracles où chacun se débrouille comme il peut : petits boulots à la station-service d’à côté, trafics en tout genre, une gamine fait déjà des passes avec les routiers de passage. Pour autant, les gamins ne souffrent pas de sévices, leur principal et légitime malheur provenant de leur statut d’enfant abandonné. Plus que son projet d’adoption, c’est sans doute le suicide de la mère d’un de ses copains qui amène le petit Vania à sa décision. Une décision à laquelle il ne dérogera pas : après avoir appris à lire pour prendre connaissance de son dossier, il embarque dans un train et part à la recherche de ses origines.

 

Dans cette aventure pleine de chausse-trappes, Vania ne renonce jamais et déploie tous les stratagèmes dont il est capable pour parvenir à ses fins. En cela, on peut le voir comme un cousin russe et moderne d’un autre orphelin en goguette : Oliver Twist. Les deux parcours partagent le goût du romanesque et si le gamin anglais ne semblait pas avoir toujours prise sur son destin, Vania fait au contraire preuve d’une détermination digne et courageuse qui ne peut au final déboucher que sur le meilleur.

C’est en substance la morale de ce beau film, irradié par le charme d’une frimousse de six ans, aux grands yeux interrogatifs et pleins d’espoir. On suit avec un vrai bonheur le chemin emprunté par Vania dans un film toujours sobre et généreux.  

 

Patrick Braganti

 

Drame russe – 1 h 39 – Sortie le 14 Février 2007-02-17

Avec Kolia Spiridonov, Denis Moiseenko, Sasha Sirotkin