cinéma

Je vais bien, ne t'en fais pas de Philippe Lioret

[5.0]

 

 

Attention, ne vous fiez pas aux apparences : si le titre et le synopsis peuvent faire craindre un mélodrame à tendance dégoulinante, ou pis encore, un feuilleton de l'été estampillé France télévision,  Je vais bien, ne t'en fait pas est beaucoup, mais alors vraiment beaucoup plus que ça.

 

Le scénario est basé sur le roman homonyme d'Olivier Adam. L'auteur a travaillé avec Philippe Lioret à l'adaptation en un scénario. Lili, interprétée par Mélanie Laurent, revient dans sa maison de la banlieue parisienne après un voyage à Barcelone. Pendant ce voyage, son frère jumeau, Loïc a disparu à la suite d'une violente dispute avec leur père aigri, joué de manière très convaincante par Kaddour Merad, le Kad de Kad et Olivier. Son frère ne donne pas de nouvelles, et Lili se laisse mourir petit à petit, refusant de s'alimenter. Jusqu'au jour où elle reçoit une lettre de son frère, qui lui explique s'être lancé dans une vie de bohème, loin de ce père honni... Lili reprend alors peu à peu le fil de sa vie, tente de vivre malgré l'absence de son frère jumeau, dont les seules nouvelles proviennent des lettres qu'il envoie régulièrement au fil de son périple. La force des liens entre Lili et son frère musicien est évidente: on devine une relation fusionnelle, une solidarité puissante pour échapper à la tristesse de la vie "banlieusardoparisienne" dans laquelle se sont installés leurs parents. Mélanie Laurent est magnifiquement mise en valeur par une mise en scène complètement au service des acteurs en général, sans être soporifique pour autant ; simple et efficace sont les deux adjectifs qui lui siéent le mieux.

 

Le film ne tombe jamais dans la facilité, n'est jamais caricatural. C'est un film intense, tendre, sensible, qui touche juste et prend aux tripes. Il reste remarquablement équilibré de bout en bout, ce qui n'était pas gagné d'avance au vu des nombreuses péripéties que traverse Lili. C'est, en plus d'une histoire personnelle touchante, un portrait social, le portrait de la famille française moyenne. Il joue ainsi le rôle d'un miroir cruel car fidèle, qui nous renvoie en pleine face l'image d'une non-vie banlieusarde et provinciale, de ces samedis soirs maudis où des millions de foyers sont hypnotisés par le vide de leur télévision.

 

La musique est très présente dans le film. Pas de manière abusive, envahissante, servant à masquer le vide des images et la vacuité des acteurs comme cela peut être parfois le cas. La chanson composée par le frère de Lili, très joliment interprété par Aaron, musicien parisien méconnu, fait atteindre au film des sommets d'émotions.

 

Le livre d'Olivier Adam est un peu plus centré sur le roman d'initiation, la jeune fille qui découvre la vie, avec le boulot, l'amitié, les aventures amoureuses, et en filigrane, ou plutôt en fil conducteur, ce manque du frère... qui est devenu plus central dans le film.

 

Adrien Potocnjak-Vaillant

 

Film français - 1 h 40 – Sortie 6 septembre 2006

Avec Mélanie Laurent, Kad Merrad, Julien Boisselier…