cinéma

Le retour de Andrei Zviaguintsev   

 
 

    Ce premier long métrage du réalisateur russe Andreï Zviaguintsev réunit deux jeunes garçons, Yvan et Andreï, qui retrouvent, après une douzaine d’années d’absence, leur prétendu père dont ils n’avaient gardé en mémoire qu’une vieille photographie jaunie. Comment va se passer ces retrouvailles ? Que vont-ils découvrir sur lui et sur eux-mêmes ? Toutes ces questions, et bien d’autres encore, ils se les poseront durant un voyage initiatique qui les amènera tous les trois sur une île isolée et austère, d’où tout semble partir et où tout semble revenir…

 

    Cette histoire intemporelle, où la mer est omniprésente et apporte à l’ensemble une touche très onirique, semble prendre ses sources dans un inconscient collectif et mythologique qui nous touche au plus profond. Le dépouillement des paysages (très belle photo !) et de l’interprétation ne donne que plus de poids à cette histoire oedipienne, où des thèmes récurrents comme l’absence, le secret, la paternité et la filiation sont ici captés et approchés avant tout sensoriellement. Le réalisateur prend bien le soin de laisser planer beaucoup de zones d’ombre et de ne pas donner d’explicatives évidentes. Libre à chacun d’imaginer et d’essayer de combler, s’il le souhaite, les questions laissées en suspens...

 

    Notons l’interprétation tout en finesse des acteurs, avec mention spéciale aux deux jeunes garçons (Ivan Dobronrarov dans le rôle d’Ivan, le cadet – et Vladimir Garine, dans le rôle d’Andreï, décédé en juin 2003 juste après le tournage), petites boules instinctives et animales, au front buté, au visage pourtant si expressif, sachant faire ressortir avec force toute la violence et l’hyper-sensibilité de leurs personnages. L’acteur jouant le père (Konstantin Lavronenko, issu du théâtre), quant à lui, est un abîme à lui tout seul, et rend le personnage attachant malgré (à cause ?) de son comportement insondable.

 

    Magnifique premier film, intemporel et minimaliste, au tempo lent et parfaitement maîtrisé par un cinéaste russe qui rentre par la grande porte dans la cour des Grands (Lion d’Or de Venise tout-à-fait méritée !), en digne héritier de Tarkovski, et dont on attend impatiemment, maintenant, le prochain film…

 

Cathie