cinéma

Osama de Siddiq Barmak   

 

 

    Sur les décombres encore chaudes d’un Afghanistan meurtri par des années de dictature  des talibans, le réalisateur Siddiq  Barmak  réalise un film dans l’urgence pour témoigner de ce que fut l’oppression vécue dans ce pays avant l’arrivée des forces américaines. Tourné avec des non-professionnels, le film dégage une vérité et une brutalité qui lui donnent presque un aspect documentaire, le tout appuyé par une jeune actrice de 12 ans au regard perçant.

 

    Le film raconte l’itinéraire d’une gamine qui se retrouve transformée en garçon par sa mère afin qu’elle puisse aller travailler chez un commerçant et ainsi ramener de quoi manger à la maison. Mais très vite les talibans réquisitionnent tous les enfants de la ville pour en faire à leur tour de jeunes talibans. Prise au piège, Osama (puisque c’est ainsi que son jeune ami l’a nommé) va devoir subir la justice impartiale des barbus enturbannés.

 

    Film témoignage en premier lieu,  Osama ne nous apprend pas grand chose sur les conditions de vie des femmes en Afghanistan à cette époque, et ne fait qu’ appuyer l’impression moyenâgeuse des mœurs imposées par les talibans à cette époque. Mais plus qu’un témoignage le film est avant tout un cri de douleur, comme un besoin d’expurger le passé, de laisser une trace dans la cinématographie et de revendiquer la naissance d’un cinéma afghan.

 

    Fait de séquences très fortes, le film montre une enfant au regard pur, empli de douleur qui ne comprend pas ce qui  lui arrive. Mais plus largement, c’est le sort des enfants de se pays qui se trouve au centre du film. Tous ces orphelins, qui se retrouvent enlevés puis endoctrinés bon gré mal gré. A ce sujet, il faut voir la séquence magnifique de l’apprentissage des ablutions, vue sous le regard inquiet d’Osama, dont on lit à chaque instant la peur dans les yeux. Plus largement, le film nous montre une villes dévastées, aux rues poussiéreuses, aux portes de bois cadenassées par les hommes derrière lesquelles se retrouvent enfermées les femmes condamnées à leur triste sort de prisonnières inactives.

 

    Cinéaste en exil au Pakistan après l’arrivée des talibans en 1996, le réalisateur Siddiq  Barmak est revenu sur ses terres en 2002 pour tourner ce projet soutenu financièrement par le cinéaste Mohsen Makhmalbaf.

Projeté en 2003 sur la Croisette dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs, Osama y avait décroché une mention spéciale du jury de la Caméra d'or, puis en 2004, le Golden Globes du Meilleur film étranger.

 

Benoît

 

Afghanistan – 1h23 – sortie le 24 mars 2004