cinéma

The Bubble de Eytan Fox

[4.0]

 

 

Depuis Tu marcheras sur l’eau (2004) et Yossi & Jagger (téléfilm de 2002 vu il y a quelques mois sur Arte), on sait que le travail du réalisateur et scénariste israélien Eytan Fox est traversé par deux thématiques récurrentes : l’homosexualité et la position de l’individu face à un conflit qui le dépasse et qui le caractérise comme partie constituante de sa propre identité (tout comme l’est d’ailleurs l’identité sexuelle). Pour Eytan Fox et Gal Uchovsky, son scénariste attitré et son compagnon dans la vie civile, l’orientation sexuelle ne pose pas en soi de problèmes particuliers, d’autant plus que les deux hommes expliquent très bien en quoi une véritable révolution s’est opérée ces dernières années, faisant de leur pays et plus précisément de Tel-Aviv une étrange terre d’accueil où affluent les homosexuels du monde entier. Dans un pays où les jeunes meurent beaucoup comme militaires ou comme victimes directes des attentats , la vie est sans doute évaluée de manière différente et relativisée par des parents déjà heureux que leurs enfants soient encore en vie.

 

C’est pourquoi la vie menée par Noam, disquaire, Yali, gérant de café et Lulu, vendeuse dans une boutique de produits de beauté, n’a rien d’exceptionnel. Vivant en colocation à Tel-Aviv, ville surnommée « La Bulle » (The Bubble) par les israéliens, transformée en cocon quasi déconnecté de la réalité des territoires occupés – à peine distants de quelques dizaines de kilomètres – et des conflits politiques qui agitent le pays, les trois jeunes gens mènent une existence qui a davantage à voir avec celle vécue par des urbains occidentaux, plus soucieux de leur vie amoureuse que du destin de leur nation. C’est Noam, alors qu’il effectue son service militaire à un check-point, qui fait entrer en quelque sorte le loup dans la bergerie en tombant amoureux de Ashraf, jeune palestinien transformé en employé clandestin dans le café de Yuli et faisant resurgir la cruelle actualité des tragiques événements qui déchirent les deux camps.

 

La première scène de The Bubble prend place au check-point où Noam a été affecté. Si elle permet d’inscrire d’emblée l’histoire naissante entre les deux garçons, elle a aussi le mérite en quelques minutes intenses et angoissantes de rendre compte de l’atmosphère particulière régnant dans ces points de jonction entre deux populations, symboles à eux seuls des conséquences de la guerre et de l’occupation. Dans ces postes frontières créés de toutes pièces, les palestiniens subissent les pires humiliations infligées par des soldats infatués de leur autorité. Eytan Fox reviendra plusieurs fois sur le check-point où se jouera de manière récurrente l’enjeu du film. Cependant, les intentions de réaliser une œuvre délibérément optimiste et emplie d’espoir ne sont pas abandonnées et le film privilégie les projets des jeunes israéliens : organiser une rave pour la paix qui transcende le conflit, ou comment le son de la musique doit surpasser le bruit des armes et des bombes. Vision un tantinet naïve et superficielle dont le réalisateur s’éloigne étonnamment dans le dernier quart d’heure pour une dramatisation tant symbolique qu’outrancière, qui finit par édulcorer l’ensemble du projet.

 

Patrick Braganti

 

Drame israélien – 1 h 57 – Sortie le 4 Juillet 2007

Avec Ohad Knoler, Yousef Joe Sweid, Daniela Wircer, Alon Friedmann