musique

Matt Elliott - Failing songs

ici d'ailleurs/discograph

[5.0]

 

 

« And the world was lost some years ago », telles sont les premières paroles entendues sur ce Failing songs, présenté comme le second volet d’une trilogie entamée l’an dernier avec le superbe Drinking songs. Comme son prédécesseur, ce disque laisse en marge les traitements numériques claustrophobes et les jeux de découpage de The mess we made, pour aller vers plus d’épure et faire la part belle à des chansons fortement ancrées dans la tradition musicale slave (des résurgences en partie attribuables à l’éducation russe orthodoxe reçue par Matt Elliott dans sa jeune enfance, et qui l’ont indubitablement marqué). Les textes sont graves et profondément touchants, Matt Elliott y offre sa vision du monde, celle d’une humanité en situation d’échec.

 

Et pourtant point de rage ou d’excès de colère ici, au contraire, il se dégage de ces chansons une douce mélancolie, une sensation d’apaisement où la voix de Matt (délectable lorsqu’ elle se fait grave et profonde), parfois doublée par celle de Sabine Chaouch, se démultiplie pour donner naissance à des chœurs solennels tout en retenue. Une retenue que l’on retrouve sur ces titres (dont la plupart ont été composés en compagnie de Patricia Arquelles Martinez) arborant volontiers des allures de valses enivrantes venues d’Europe de l’Est, voire de Kazatchok à allures variables, où les guitares dépaysantes régulièrement tenaillées par un spleen hispanique, jouent la carte de la délicatesse (celle de la rugosité ne pointe son nez que sur Chains ou à la fin de Desamparado), le jeu de violon d’une finesse accablante est digne d’un exercice de voltigeur, et les notes de piano perlent en toute discrétion. Derrière les fûts et au violoncelle, c’est le frère d’âme Chris Cole (Mr Manyfingers, auteur du chef-d’œuvre Our worn shadow) qui s’adonne à des jeux de caresse avec ses balais, avec la dextérité et l’audace qu’on lui connaît : à cet égard, on le remercie de nous régaler avec ses rythmiques ternaires flottant à contre-pied sur les mélodies binaires de The failing song.

 

Mais ce serait passer à côté de l’essentiel que de se perdre dans des considérations techniques, car ce qui fait une fois encore que ce disque de Matt Elliott est en tout point une réussite, c’est qu’il s’agit d’un reflet de son âme (grise), et donc à son image : grand, singulier, honnête, sensible et touchant.

 

Sébastien Radiguet

 

Tracklist :

Our weight in oil

Chains

The séance

The failing song

Broken bones

Desamparado

Lone gunmen required

Good pawn

Compassion fatigue

The ghost of Maria Callas

Gone

Planting seeds

 

Durée : 49’30

Sortie : 23 octobre 2006

 

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