musique

Modest Mouse -  Good News for People Who Love Bad News   

Epic - 2004

 

 

 

     Voilà typiquement le genre de groupe dont on se dit qu’il ne pouvait voir le jour et exister qu’aux Etats-Unis. Pas demain la veille à priori, que des britons se montreront aussi peu soucieux de leur image, aussi peu attachés à une quelconque chapelle (sinon celle justement des électrons libres). Dans le (non)style et dans l’esprit, Modest Mouse pourrait même faire figure de prototype et prendre le relais de Pavement.

 

    Intègre, bordélique (outre un son volontiers insaisissable, ses membres multiplient les side-projects, comme Ugly Casanova pour son leader Isaac Brock), le groupe suit pourtant lui aussi depuis quelques années un chemin plus rectiligne. Depuis The Moon and Antartica pour être plus précis, Modest Mouse se fait sensiblement plus aimable, ne cherchant plus à délibérément saloper certaines de ses compositions par défiance ou volonté de ne pas se livrer au premier venu. Une souris toujours aussi modeste, mais un peu plus mickey en somme. C’est d’autant plus remarquable que le groupe n’a pas pour autant gommé toutes les aspérités qui le rendent si intéressant : on retrouve toujours cette sensation de folie douce un peu inquiétante, cette impression que tout et surtout n’importe quoi peut se passer d’un moment à l’autre.

 

    Bonne, voire très bonne pioche donc pour les fans de pop relâchée, virevoltante voire brinquebalante et un poil neurasthénique (cf le titre bien sûr et les paroles régulièrement flippantes). L’air de rien, le groupe parvient en outre à réussir une synthèse assez remarquable de 10 ans de rock indé américain de haute volée : un peu Pixies pour les saillies colériques borderline et électriques (Bury Me With It dont le titre s’explique par l’intermède précédent intitulé Dig Your Grave, quand on vous dit que ces garçons ne respirent pas vraiment la joie de vivre…) ; un peu Pavement pour l’approche désinvolte d’éternels slackers et le chant pas vraiment apprêté ; un peu alternative-country pour ces virées régulières sur un terrain folk plus caressant (sublime Blame It on the Tetons qui laisse entrevoir le potentiel du groupe dans un domaine plus conventionnel) ; un peu dans l’air du temps même, avec une poignée de chansons nerveuses et presque dansantes, réminiscentes de la new-wave et qu’on imaginerait bien intégrées au répertoire d’un groupe new-yorkais en « the ». Un peu joyeux enfin, et in-extremis, sur un dernier titre à reprendre en chœur (The Good Times Are Killing Me) et justement interprété en compagnie des Flaming Lips au grand complet (Dave Fridmann compris).

 

    Prouesse non négligeable, le band d’Isaac Brock a su trouver son propre langage, inédit et singulier, sans être totalement déstabilisant, via une instrumentation des plus traditionnelles. L’air de rien, lorsque Good News for People Who Love Bad News s’achève, on se dit qu’on vient sans doute d’entendre un des meilleurs groupes américains actuels, pas moins.

 

Laurent