musique

Giant sand - Is all around the map

Thrill Jockey/ Discograph - 2004

 

 

 

    Un jour c’est sûr on va se lasser, c’est obligé.  A force de nous abreuver chaque année, ou presque, d’un album pétri de folk vacher, de grands espaces et de racines country du pays où l’American English ajoute à la sincérité de l’exercice…  C’est sûr on va finir par user notre soif de pittoresque puis se détourner de l’exercice de l’homme aux mille visages : Howe Gelb (à la ville comme à la scène), Band of Blacky Ranchette, Calexico, OP8, Friends of Dean Martinez,  Rainer, Giant Sandworms… Viendra un temps où on attendra l’annuelle livraison avec beaucoup moins d’intérêt.

 

    Dans l’attente de cette lassitude annoncée, c’est avec un plaisir chaque fois renouvelé qu’on retrouve la formation. On se plait à reconnaître à chaque album la patte spécifique liée à chacun des patronymes utilisés; on dissèque la part de récupération de la tradition, la part d’évolution du style country à l’époque contemporaine… Et on se laisse bercer finalement par ces sonorités qui tiennent, pour nos oreilles européennes, autant du charme de la world music que de la pop et du rock au sens large.

 

    Le nouvel épisode permet, d’ailleurs, autant l’analyse que le plaisir d’écoute.  Délaissant plus encore ses compères Burns et Convertino occupés à assumer le succès d’estime de Calexico ; Gelb en seul maître de cérémonie, accorde à la simplicité d’enregistrement, à la véracité du live, l’importance qu’il semble lui accorder depuis l’exercice lo-fi et la tentative d’enregistrement « on the fly » qu’était le Band of Blacky Ranchette. Ici les prises semblent enregistrées  dans le salon de Gelb plutôt que via un dictaphone, mais on y retrouve cependant l’énergie qui naît lors de jam sessions entre musiciens. Au rayon des similitudes, on se plaira à retrouver la rocaille de la voix de Gelb, les caresses de la pédale steel, et la rythmique si caractéristique de la country qu’on aime tant dans la galaxie Giant Sand. Dans la pure et simple lignée des précédents opus sans pourtant (encore ?) provoquer un quelconque ennui. Pourquoi ? Mystère ? Et ce même quand Gelb se lance pour quelques titres, dans le crooner cross over de western et de piano bar Lynchien, un peu trop fade pour emballer réellement, pas dupés quand la canaille nous titille en chantant en Français.

 

    Au rayon des nouveautés que ne manque pas de nous proposer ce nouvel album, signalons le binôme vocal qui naît de l’entrelac des voix de Gelb et de l’anglaise Scout Niblett. Signalons aussi l’emportement de diablotin sortant de sa boîte qui croît au fil de l’album. Il envoie is all over the map lorgner du côté du rock burné mais classe façon Neil Young  ou encore du côté de l’intelligentsia new-yorkaise  façon Lou Reed, pour finir en joyeux drille par une relecture différente du très Giant Sandien classico et en grand n’importe quoi mélange de punk attitude et de biture estudiantine, où la fille de l’auteur prend part de bonne grâce. Détonnant, étonnant, et franchement jouissif. Quoi de mieux pour un nouvel opus ?

 

    Is all over the map évolue entre continuité pas encore usée et plaisir bon enfant des beufs entre potes… la cow-boy attitude en plus. La réponse à l’énigme du plaisir renouvelé doit se loger quelque part dans la magie du Stetson de Tucson, Arizona.

 

Denis Verloes

 

Tracklist:

01 Classico
02 NYC of time
03 Remote
04 Flying around the sun with remarkable speed
05 Cracklin’ water
06 Rag
07 Muss
08 Drag
09 Fool
10 Les forçats innocents
11 Napoli
12 Hood (view from a Heidelberg hotel)
13 A classico reprise
14 Anarchistic bolshevistic cowboy bundle
15 Ploy

 

durée: 48’05

 

Plus+:

www.giantsand.com