musique

Jack the Ripper - Ladies first

Village Vert/Wagram

[4.5]

 

 

Ladies First, troisième album des Ripper, perle hétéroclite aux douze chapitres et mille facettes, c'est le lyrisme sans grandiloquence, le baroque sans démesure, la surcharge sans saturation. Cet album s'épanouit selon le même plan que I'm Coming, leur précédent opus. Dès le morceau d'ouverture, l'auditeur est projeté dans un monde à part. Calme et rassurant au début, From my veins to the see, de thème dissonant en cassure de rythme, devient opaque et presque angoissant. Déjà le morceau s'achève, et l'on est ailleurs.

 

Un monde que l'on pourrait qualifier, malgré l'évidente répugnance du groupe pour les étiquettes, de "cabaret pop" se dessine peu à peu. Un monde où chaque instrument tantôt caresse, tantôt assène son fiel sonore. Car c'est cela dont il s'agit lorsque Mazurel emprunte la voix d'outre-tombe du personnage qu'il incarne dans Going down. Le piano, le violon, bridés au début du morceau s'insurgent contre l'excès de formalisme initial. Un abcès gonfle et éclate alors, déversant un incroyable déluge de notes qui vient balayer les dernières bribes de lucidité de l'auditeur.

 

De nombreuses chansons présentent une très forte personnalité. Parmi elles, et sous ses faux-airs de ska, la piste cinq, I was born a cancer, est sans doute la plus immédiate. La plus formatée aussi. Sur un ton pourtant guilleret, le saxophone, la basse, le violon font écho à la voix de Mazurel qui évoque un thème paradoxalement désespérant. Chaque instrument s'octroie un instant de majesté avant de reprendre sa place dans le fil de la musique. Ca donne envie de pleurer et danser à la fois. Sans doute le "single" de l'album.

 

White men in black, avec ses chants parlés et sa rythmique de cheval au galop, se clôt d'un poème "noir" tout en français, petite minute familière qui sonne singulièrement dans cet album exclusivement anglophone. Mazurel joue de ses multiples voix comme d'autant d'instruments, jonglant avec les atmosphères, les émotions. Parfois chevrotante, parfois pure, rageuse, rassurante, criarde, douce, bestiale, c'est une voix singulière, omnipotente et qui n'agace pas. Chose rare!

 

Définitivement, on voyage. Cet album troublant, entêtant, capiteux presque, met en évidence combien ce groupe a trouvé son identité, sa griffe musicale, diablement belle et efficace. Il s'agit-là d'un excellent album tous publics, novateur et assez facile d'accès, sans doute parmi les meilleurs de 2005. Cette chronique aurait sans doute affiché cinq étoiles si son auteur n'espérait pas davantage encore d'un futur album. Une marge laissée à cet énorme potentiel sur lequel on ne manquera pas de garder un oeil émerveillé.

 

Fabrice Berro

 

Tracklist :

01. From My Veins Ti The Sea
02. I Used To Be A Charming Prince
03. Goin’ Down
04. White Men In Black
05. I Was Born A Cancer
06. Old Stars
07. Vargtimmen
08. The Apemen, The Bride and The Butterfly
09. Aleister
10. Hungerstrike At The Supermarket
11. Words
12. Hush

 

Date de sortie : 17 octobre 2005

 

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