musique

The good, the bad & the queen - s/t

Parlophone / EMI

[4.0]

 

 

Sur le papier ca pouvait faire peur. Rassembler quatre stars indé et les amener à collaborer ensemble sur un projet commun. On sait que souvent ce genre d’exercice constitue en un collage, contre nature, d’identités musicales cherchant à tirer la couverture à soi et marquer l’album de son empreinte, à coup de carte de visite sonore.  On avait donc peur, quand on apprit que Damon Albarn (Blur, Gorillaz, Mali music, democrazy… ) Simon Tong (The Verve), Danger Mouse (Gnarls Barkley…) le retraité Paul Simonon (The Clash) et le mythique Tony Allen (Fela Kuti’s band) travaillaient ensemble à la composition d’un album aujourd’hui sur notre platine. Parce que bon… ils allaient quand même pas nous faire le coup d’un Gorillaz bis, ni celui du super groupe fat…

 

Et en pratique : Non. A l’écoute, on se rend compte, dès l’entame, que tout notre petit abécédaire pop a vieilli. Albarn rôde autour de la quarantaine. Il est loin le temps de la coupe au bol et de la noisy de leisure. A l’instar de son âge, la musique qui trotte dans sa tête à vieilli, elle  aussi. A la vingtaine la morgue de Parklife, la trentaine le dancefloor artie de Gorillaz, à la quarantaine la musique de vieux dans The good, the bad & the queen. Mais vieilli, n’est pas ici un terme bien choisi. Comme les influences des différents individus rassemblés au sein de cet improbable collectif, leur façon de faire de la musique a pris de l’âge, comme un cru dormant au fond de sa cave ventilée, serait-on tenté d’écrire. Simonon, Albarn et les autres, ont entrepris, ces vingt dernières années des parcours de maturation personnelle et musicale. Ils ont pris le temps d’élargir leur manière de faire de la musique. En abordant d’autres styles musicaux ou d’autres formes d’art. Autant de destins dont le condensé est ce premier album à multiples mains.

 

The good, the bad & the queen n’est pas un album pop. Pas dans le sens masturbatoire de Blur ou Verve, ni dans le genre mouvant de Gorillaz. Ce n’est pas non plus un disque punk : il n’y a ni dub, ni éructation ostentatoire. L’album n’est pas non plus un album jazz, world, house ou fusion. Mais on sent qu’un peu de tout ces univers se sont télescopés avant de s’harmoniser, au fil d’un album apaisant, mais pas apaisé, de facture lissée, comme en à l’air tout eau qui dort. Un album qui s’écoute de préférence façon « trentenaire », soit assis au salon, clope nonchalante (ou pas) au coin de la lèvre, verre de rouge porté négligemment à la bouche, le dernier bouquin de Kunkel à la main. Le type de plaisirs qu’on se connaissait jusque là avec certains albums électroniques chargés d’ambiance, dans les méandres du post rock sans hargne, ou dans l’intelligent rock de groupes tels High Llamas et Tortoise.

 

On pourrait repérer ici ou là la rondeur de la basse de Simonon, le gimmick : arme fatale de Damon, la guitare rampante de Tong ou le groove percussif de Allen. Ce serait disséquer un album qui ne se lit pas avec ce type de clé de tri. Ce qui frappe d’emblée ce sont les mots justes, parfois grinçants d’un citoyen Albarn londonien en prise directe avec la description du quotidien de sa ville. Plutôt cynique que vengeur. Plutôt désabusé qu’anarchiste. Ce qui percute ensuite, c’est un album communautaire où les univers musicaux des protagonistes se présentent, se distinguent, oui… Mais se marient immédiatement avec un pan de l’univers du voisin. Une palette de couleurs, une toile des pinceaux, amenés par chacun des artistes, concourrant à la beauté d’un tableau qu’on dirait finalement peint par une seule main, somme des identités de toutes les autres. Avec politesse, vérité, justesse et une telle évidence dans les choix d’option, qu’il apparaît que chaque plage de ce 12 titres est à sa place, puzzle et pièce du puzzle formé par ce premier opus nécessaire et indispensable à l’histoire du disque, mais peut-être bien aussi à l’histoire de la musique en général. Ces 4 fantastiques viennent de jeter ici le manifeste d’ un nouveau courant musical, au foyer du big bang pacifique de leurs quatre univers. Sans doute un des disques qui compteront en 2007.

 

Denis Verloes

 

Tracklist

 

01. History song           

02. 80's life                

03. Northern whale              

04. Kingdom of doom            

05. Herculean             

06. Behind the sun              

07. The bunting song

08. Nature springs

09. A soldier's tale

10. Three changes

11. green fields

12. The good, the bad & the queen

 

Durée: 43’ 00’’

Date de sortie: 22/01/2007

 

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