musique

Southsonicks - Ars Longa   

Scandinum/PIAS - 2003

 

 

 

    Ca y est, encore un ! C’est ce qu’on est tenté de penser, à l’écoute des premières notes de Ars Longa. Si le monde du rock se tourne du côté du garage rock et des années 80’, la frange « qui compte » dans la techno française, a décidé que le dernier semestre de 2003 et l’aube de 2004 serait vouée à un bon gros retour du son de Detroit et de Chicago version 90’s.

Après Agoria en novembre 2003, voici chez les Nîmois de Scandium, le premier album de Southsoniks aka Antonin Barre, Français installé à Lausanne.

 

    Les sons, aux confins des « standards » dancefloors de la house et des sonorités plus abruptes de la techno, renvoient à la toute fin des années 80 ; quand pour faire sonner un clavier de manière synthétique, il suffisait encore de tourner de bons vieux potards vers la droite. Un son « old school » en forme de clin d’œil, puisque les influences de la house et de ses avatars dance, et deep-house rendent néanmoins le tout beaucoup plus moderne et moins abrupt que les prédécesseurs dont la musique de Southsoniks  se sert, en référence. Car ici il y a aussi « les beats qui tapent fort », modernes, filtrés et distillés, pour rendre dansantes les incursions de Southsoniks dans le grand livre d’image de la musique électronique.

 

    Dès lors, l’album sonne comme une bonne macédoine, faite de bonnes recette et de bons ingrédients : si des titres comme Ars longa ou coxinette sont immédiatement identifiables comme autant de regards dans le rétroviseur,  les sons de Litentia Electronica par exemple, n’auraient pas démérité sur un album de Mike Paradinas tandis que son groove dégoulinant et musclé aurait pu servir de musique d’attente avant un des récents concerts des Primal Scream. What’s making me évoque autant les Sabres of Paradise que Mills ou Carl Craig, tandis que People of rythms est à peine moins bourrin et festif qu’un single funky de Basement Jaxx. Il y a pléthore de  références citables. Elle sont légion et forcément ineptes.

 

    Southsoniks pille les sonorités de Detroit, les nappes de synthés, les effets echo des delays, et les nappes qui s’entremêlent en autant de phrases sonores. Pourtant, là ou le confrère Agoria pratique le pillage par omission, picore à la fontaine de Detroit de manière parcimonieuse et presque gênée … Là ou d’autres pratiquent l’ironie en rendant le pillage presque kitsch : Paul Nazca etc.  Southsoniks a l’honnêteté musicale d’un The Hacker ou d’un Felix da Housecat : Ici l’argile sonore dont se sert le musicien est ouvertement assumée, travaillée, malaxée et finalement réappropriée. Car si les sons sont indubitablement connotés et passéistes, il n’en est pas de même de la démarche artistique de Antonin Barre. Il reprend l’histoire de la musique là où la techno l’a laissée, juste avant le carrefour de la « French Touch ». Il poursuit une aventure laissée en suspens depuis des années. Il y ajoute 12 singles enrichis des bénéfices rythmiques de 13 ans d’inventions techno dance.

 

    Un album qui ne peut, par essence, pas révolutionner la musique de genre, mais un album aussi intéressant que dansant. Efficace pour les bonnes branlettes intellectuelles concernant l’avenir de la techno made in France tout autant que pour les soirées « bouge ton corps », de Paris, Bruxelles, Genève et du monde.

 

Denis