musique

Tim Burgess - I believe    

PIAS - 2003

 

 

 

    Tim Burgess résiste. Tim est un survivant. Chanteur découvert par casting pour une formation rock à la recherche de sa voix ; il dispense habituellement un chant de nez pour le compte des Charlatans : nasillement marque de fabrique des formations anglaises nées à cette époque.

Il a découvert récemment qu’il pouvait assagir sa voix, chanter mieux que la plupart des leaders de « teenage bands ». Burgess s’est rendu compte aussi qu’il pouvait torturer ses cordes vocales et lorgner du côté de parodies à peine ridicules du père Prince.

Après le split des Stone Roses, la demi-réussite solo de Ian Brown et les lamentables Seahorses de John Squire; la volonté de l’homme et la ténacité du groupe ont fait des Charlatans le dernier représentant sur terre de la déferlante baggy du début des années 90. Mieux, le dernier groupe de cette époque capable de traverser la décennie à coups d’albums cocktails de continuité et de renouvellement : la voix de Tim et la découverte de la musique US mélangées à la traditionnelle basse groovy et au piano « dance » en étant les exemples les plus récents, sur un Wonderland d’excellente tenue.

 

    C’est en solo que Burgess poursuit son incursion en territoires américains, quelque part sous le soleil de Californie où l’homme a établi résidence. Plongeant dans une voie médiane entre les Charlatans et les racines américaines qu’il découvre ; il nous revient avec un album excellent, tout de pépites pop vêtu.

 

    Held in straps, Say yes, We all need love titres tour à tour entêtants ou charmeurs, vont chercher dans la bibliothèque des Charlatans les formules d’une tradition pop anglaise de très haute tenue. Mais Tim a décidé d’explorer le patrimoine musical des USA : I believe, Only a boy, singles probables, évoquent les meilleurs moments de Wonderland quand les lads de Manchester découvraient à peine le nouveau continent. Tim y maîtrise pourtant mieux sa voix aiguë et le piano délaisse le groove pour se faire gimmick, cédant la vedette rythmique au peloton de cuivres. Avec Oh mi corazon et All I ever do, les origines anglo-saxonnes du Mancunien rencontrent les chœurs « la-la-la » et une grosse production « variété » dans la plus pure tradition outre-atlantique. Les Byrds ne sont pas loin et l’auditeur ressent, à chaque piste, l’étonnant bonheur que le chanteur a d’être là, à jouer ce type de musique. Pas bégueule, Burgess partage son plaisir, et on respecte l’amour pour ce « corazon » qui a attiré Tim à Los Angeles. L’homme ne s’arrête pas en si bon chemin. Il poursuit sa grande randonnée musicale en plongeant plus loin encore dans les racines de sa terre d’adoption. Plus profond dans l’histoire, Tim nous évoque les Stones sur un touchant et « Sixties » Po boy soul. Il convoque l’âme et l’harmonica de Bob Dylan au chevet de ballades en forme de poignants cris d’amour : Be my baby et Love to spend the night. Et avec years ago c’est du côté de Simon &Garfunkel explorant la musique country que l’auteur clôture son premier pèlerinage musical par un regard dans le rétroviseur de sa vie. Sans tristesse ni nostalgie.

L’ensemble est monté en kits d’alternance entre titres énergiques et accalmies offrant un rythme coulant et libéré où le temps passe trop rapidement. On en redemande et on se dit que les faces-B des singles offriront sans doute d’autres voyages intéressants dans les plaines américaines.

 

    En onze titres plein d’âme et de joie, Burgess nous crie qu’il « croit en la côte ouest et en l’âme californienne ». En onze titres efficaces on le suit résolument quand il dit faire confiance à ce « spirit » qui désormais l’anime. Et quand Tim Burgess chante « I believe » nous on le croit et on est sûr que le meilleur est à venir pour lui, avec ou sans les Charlatans.

 

Denis