musique

Stephen Duffy & the Lilac Time - keep going

Folk modern/chronowax - 2003

 

 

 

    Pauvre Stephen Duffy… Eh oui, le pauvre car il donne le sentiment d’être toujours passé à côté de quelque chose. Ca n’est pourtant pas faute d’avoir essayé…

 

    Jugez plutôt : premier chanteur de Duran Duran (eh oui, on l’oublie trop souvent), il quitte le navire avant le succès. Bon, ok, mauvais exemple, il a bien fait de partir… Il fonde alors, en compagnie notamment de son frère Nick, The Lilac Time, sorte de petite entreprise de réhabilitation du folk anglais (le titre fait référence à Nick Drake auquel il doit beaucoup), qui ne rencontrera jamais le succès escompté. Pire même, là où Felt est devenu cultissime, son groupe ne suscitera jamais qu’un vague sentiment de respect. Il se dissout en 91. Duffy multiplie alors les collaborations diverses : avec le groupe power-pop Velvet Crush, puis avec le violoniste Nigel Kennedy, toujours sans aucun véritable écho, si ce n’est l’appui de quelques critiques sensibles à ses indéniables talents d’auteur-compositeur. Même la déferlante brit-pop de 1994 le laissera benoîtement au large : son projet Me Me Me monté avec Alex James le bassiste de Blur n’ira pas bien loin.

 

    Sans doute définitivement convaincu de sa non-capacité à rencontrer un succès digne de ce nom (ou du moins de sa longue carrière), il semble depuis quelques années s’être fait une raison en revenant à ses premières amours acoustiques et à ce qu’il a toujours su faire de mieux : écrire des chansons.

 

    Keep Going est donc un recueil on ne peut plus classique pour qui est un peu familier du travail du bonhomme. Plus encore que par le passé, Duffy décline le mode acoustique via tous les genres possibles et imaginables: folk classique guitare et voix (Home, comme une profession de foi en ouverture-retour au bercail), folk-pop (Bank Holiday Monday qui aurait fait figure de mètre-étalon à la grande époque de l’indie-pop), country-pop ( magnifique The Silence qui  nous refait le vieux coup du duo masculin-féminin), blues même (on croit entendre Ry Cooder sur I Wasn’t Scared of Flying) , tout y passe, avec un talent et une dextérité confondants.

 

    Ne pas se fier à ces mélodies en demi-teinte et à cet aspect homogène: nulle monotonie ici, mais un songwriting solide et inspiré, sans surprises certes, mais par conséquent, sans mauvaises surprises. Ce disque synthétise et fait la somme de ce qui fait la musique de Stephen Duffy depuis près de 20 ans, et il constitue en ce sens une merveilleuse introduction à son univers pour le néophyte. Keep Going est, comme disent les Anglo-saxons, un "grower", c’est à dire un album d’apparence un peu anodine, mais dont les qualités de révèlent sur la longueur, « grandissent » au fur et à mesure des écoutes. Quant à savoir si ces chansons introspectives et mélancoliques trouveront un quelconque écho chez un large auditoire…

 

Laurent