musique

Tindersticks - Waiting for the moon 1/2
Beggars Banquet - 2003  

 

 

 

    La musique est, à l’instar des autres arts, totalement subjective. On s’étonnerait de lire un Barbara Cartland qui ne se répandrait pas en émois amoureux, un Stephen King qui ne nous plongerait pas dans le suspense ou un Houellebecq qui traiterait d’autre chose que d’introspection. De la même manière, en musique, il est de ces groupes, comme Mogwai, Bowie ou Cure à qui il suffit de remettre au chaudron les mêmes éléments, avec une nouvelle touche "du chef", pour satisfaire une grande majorité de ses fans. Parce que c’est ce que les fans demandent et exigent de leur groupe culte.

 

    Les Tindersticks font résolument partie de cette catégorie, en version indé. Waiting for the moon la galette nouvelle qui débarque sur nos platines, revendique fièrement une certaine continuité/conformité avec le précédent Can our love….

Ce qui semble dommageable pour les amateurs de passage, tels votre serviteur, est un gage de qualité pour les fans qui ne se trouvent pas dépourvus quand les 10 titres nouveaux sont venus.

 

    Peu de groupes sont arrivés à un tel niveau d'unité stylistique que les Tindersticks. D’album en album, le groupe nous convie à prendre part à une nouvelle ballade nocturne, romantique et mélancolique. C’est encore le cas pour cette ode à la lune où la voix de Stuart Staples nous invite dans le grand parc, près du kiosque à musique, à deux pas du lac ou l’astre de la nuit se reflète entre les roseaux. Là l’auditeur retrouve un groupe en costard, très propre mais un peu ébouriffé, et un chanteur qui raconte des mots doux à un micro conquis par avance.

 

    En de longues mélopées langoureuses, la guitare acoustique en berne, la rage retenue d’une batterie jazz et le violon larmoyant, les Tindersticks peaufinent un numéro de charme qui séduit les presque trentenaires aux yeux pleins de rêves. Tandis que le groupe finit d’emballer les plus belles femmes de cette soirée dans le grand parc, rares sont ceux qui osent critiquer le groupe pour usage frénétique et désormais presque grossier des ficelles qui ont tissé les premiers albums.

Pourtant, les chansons des Tindersticks commencent désormais traditionnellement par des mots susurrés à l’oreille, servis par un roulement léger de batterie jazz ; avant de s’emballer sous le roulement de la basse et l’apparition des cuivres. Une continuité dans l’art délicat de pousser la ritournelle.

Pourtant, Stuart ne modifie en rien sa voix ou sa façon de chanter : toujours le même chevrotement en fin de phrase, toujours ces répétitions en forme de litanies et la progression vers les sphères… Sphères que Stuart et son groupe rejoignent à chacun des dix titres de l’album, lassant les « non-fans ».

« Non fans » qui ne parviennent plus à être surpris mais restent néanmoins révérencieux devant la qualité d’un titre à deux voix : Sometimes it hurts, en duo avec Lhasa de Sala, summum du cliché Tinderstick-ien efficace, lorgnant à la fois vers les racines du blues country et vers les vieux costumes du groupe.

 

    Agaçant Tindersticks qui même lorsqu’ils nous gratifient d’un album moins meilleur que les précédents demeurent intouchables et efficaces. Odieux romantiques qui jouent avec l’état de grâce et les émotions des auditeurs pour nous livrer, même en roue libre, parmi les plus émouvantes chansons d’amour que 2003 nous ait donné d’écouter.

 

Denis