roman

Jean-Philippe Blondel - Accès direct à la plage     

Delphine Montalant – 2003

 

 

 

   Il existe une théorie facilement démontrable par une loi de probabilités qui prouve que chaque terrien est relié à n’importe lequel d’entre eux par sept personnes au maximum. De manière moins globalisée, les notions de rencontres et de cheminements, de destins qui se croisent et se recroisent, fruits de hasards ou de choix, exercent chez moi une grande fascination. Le cinéma de R. Altman ou de K. Kiewloski a toutes mes faveurs. C’est pourquoi le premier livre de ce prof d’anglais champenois m’a t-il d’emblée séduit par son sujet : un patchwork de personnages suivis sur une trentaine d’années dans quatre endroits de villégiature différents. Ainsi de 1972 à 2002, nous allons de Capbreton à Hyères, puis de Perros-Guirec à Arromanches côtoyer des hommes et des femmes aux vies et aux parcours étroitement mêlés, d’ailleurs parfois à leur insu.

 

    Ce serait pourtant une erreur de réduire l’ouvrage de JP Blondel, à peine une centaine de pages pour vingt chapitres et quelques annexes, à un brillant exercice comme une sorte de toile savamment tissée. Non, là où Accès direct à la plage se situe sans doute possible dans la lignée des grands livres, c’est évidemment à cause du talent de l’auteur à nous décrire en quelques lignes une atmosphère, un trait de caractère ou même le vide abyssal que peut constituer une vie humaine.

 

    L’étendue des sentiments dépeints, du dégoût à l’admiration, de l’abject au merveilleux, de la haine à l’amour ne peut pas ne pas avoir en chacun de nous une résurgence, un écho et il est clair que chaque lecteur peut s’identifier aisément à l’un ou l’autre des personnages. Le miracle du livre est aussi de nous faire éprouver la même palette de sensations à sa lecture. Parfois, trois lignes peuvent suffire à vous faire entrevoir toute l’horreur ordurière des hommes. Mais JP Blondel n’est pas non plus tendre avec le genre humain car le plus souvent, il met en avant les mesquineries et les petitesses qui ternissent la vie : conflits familiaux, divorces, déceptions sentimentales ou amicales. Au delà de cette vision pessimiste et sombre de l’humanité, l’auteur excelle aussi à nous montrer la difficulté du dialogue et de la constitution de liens durables. Comment nous avons la triste habitude de juger de la qualité de l’autre par sa seule apparence ou son seul comportement sociétal, sans avoir le moindre soupçon de ce que peut être sa vie réelle.

 

    Cependant, le roman se clôture par l’histoire la plus forte et la plus significative, qui vous prend inopinément à la gorge et dont la seule genèse pourrait amplement remplir un seul ouvrage. Je veux y voir comme la volonté farouche de l’auteur à croire encore aux belles histoires et aux grands destins, même si cruels et tragiques.

2003 démarrait au cinéma avec la trilogie de Lucas Belvaux, film multiple et choral par excellence et se termine, en tout cas pour moi, par la découverte de ce roman fantastique précédé d’une réputation absolument pas usurpée.

 

Avec une écriture simple faite de phrases courtes, avec un sens magnifique de l’empathie qui permet à JP Blondel d’être au sens premier du terme tous ses personnages, ce roman est bouleversant d’universalité et tend à chacun de ses heureux lecteurs un miroir de sa propre existence.

 

 

Editions Delphine Montalant

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