roman

Dominique Mainard - Je voudrais tant que tu te souviennes

Editions Joëlle Losfeld - 248p, 17.90€

[4.0]

 

 

"…cette chanson était la tienne…" pourrait murmurer chacun des protagonistes aux autres personnages du dernier roman de Dominique Mainard, fait  de rencontres, de liaisons, de croisements, de pertes et de retrouvailles. Mais c’est avant tout une histoire de femmes : celle de Julide, jeune fille de 16 ans issue d’un parent étranger et attendant un mariage de raison imminent et un retour « au pays » forcé, sa tante Albanala, voyante, qui préfèrera rapidement l’exil en terre d’origine que la survie dans un pays qu’elle n’aime pas, et Mado, amie de Albanala, vieille dame esseulée et discrète, qui se liera fortement d’amitié avec Julide après le départ de son amie. Mais l’arrivée dans leur ville d’un étranger, taciturne et mystérieux, va peu à peu modifier la donne, et tirailler les deux femmes entre l’amitié, l’amour, le désir ou le renoncement….

 

Présenté ainsi,  Je voudrais tant que tu te souviennes  pourrait ressembler à une de ces innombrables histoires sentimentales un peu mièvres et convenues, un des ces plates sagas passionnelles qui ennuient rapidement même les lecteurs les plus indulgents…mais c’est sans compter sur le délicat talent de l’auteur qui relève la gageure de rester passionnante en déroulant son histoire par légères touches poétiques, préférant effleurer ses personnages plutôt que de les mettre à nu. De sorte qu’à aucun moment, les personnages ne nous semblent déjà vus et stéréotypés, puisque l’écriture, toute en nuances, esquisse à peine des portraits émouvants et attachants.

 

C’est un livre extrêmement pudique, qui parle de sentiments durs et terribles avec une sensibilité assez rare de nos jours, où l’écriture épate-bourgeois est le plus souvent de mise. Dominique Mainard fait vibrer ses personnages de manière infime mais intime, colle au plus près de leurs émotions tout en laissant planer le doute, le mystère, l’impression de diffus…de sorte que l’on est plus proche du conte, de la fable métaphorique que du roman sentimental classique.

 

Un beau livre, doux et mélancolique, précieux dans sa multitude de détails touchants, comme ces clichés pris de très près par Mado, qui tente de « déceler la beauté de notre monde » dans des bouts de rien.

 

Jean-François Lahorgue

 

Date de parution : 11/01/2007