roman

Brady Udall - Le destin miraculeux d’Edgar Mint  

Albin Michel - 2001  10/18 - 2003

 

 

 

    Révélé il y a quelques années par un recueil de onze nouvelles regroupées sous le titre Lâchons les chiens (10/18 n° 3227) mettant en scène des bouts de vie dans les coins reculés de l’Utah et de l’Arizona, Brady Udall, jeune écrivain américain par ailleurs professeur de littérature dans une université du Middle West, nous revient avec un roman au titre séduisant et prometteur : Le destin miraculeux d’Edgar Mint.

 

    Un destin particulièrement chaotique pour ce jeune Apache, rejeton d’une mère qui a sombré dans l’alcoolisme et la déchéance et d’un père blanc désireux de devenir un véritable cow-boy et qui s’enfuit à l’annonce de la grossesse de sa compagne. Un destin qui faillit s’arrêter le jour où le facteur lui roula sur la tête et le laissa pour mort. Mais c’était sans compter sur le talent d’un jeune médecin, Barry, aux méthodes étranges et néanmoins efficaces qui parvient à le faire sortir du coma et lui redonner la plupart de ses facultés et possibilités, hormis celle d’écrire manuellement. Edgar va d’abord passer ses premières années à Sainte Divine, hôpital qui tient de la cour des miracles. Il s’y lie pourtant d’amitié avec Art, un vieil homme gueulard et solitaire suite à la disparition de sa femme et ses deux enfants. La remise sur pied du petit Edgar l’amène à quitter son cocon hospitalier et rejoindre Willie Sherman une sorte de collège où se mêlent orphelins et déshérités de toutes sortes. Il y fait le dur apprentissage de la vie, en proie aux coups et railleries de ses camarades. Acceptant d’être baptisé et de se convertir à la religion mormone, Edgar part pour Richland au sein d’une famille d’adoption anéantie par la mort d’un jeune enfant qu’il quittera quelques années plus tard pour affronter de manière inattendue son destin.

 

    Autant le dire de suite, c’est un sacré bon bouquin qui vous ballade dans ces états américains campagnards, peuplés de gens un peu rustres, et qui vous fait suivre, année après année, une histoire magnifique où la cocasserie se dispute à la gravité. Brady Udall est doté d'un talent incroyable pour la mise en scène de son histoire avec notamment une multiplication de détails et d’analyses des sentiments et des évolutions d’Edgar, illustré par un sens exacerbé de la comparaison imagée. C’est vrai qu’il y a ici une écriture proche du cinéma, et le lecteur a au fond peu d’efforts à fournir pour imaginer tout ce que l’auteur lui raconte. On se laisse transporter par ce roman profond et incomparable jusqu’à une apothéose finale inattendue et plus qu’émouvante.

 

    Certains ont été tentés de comparer l’Edgar de Udall au Garp de Irving, mais même si ces deux trajectoires, où le loufoque et la tragédie se confondent, peuvent être rapprochées, Udall dépasse de beaucoup son collègue par la force et l’intensité palpable de son roman.

Embarquez-vous donc derrière les basques de ce petit garçon ressuscité, futé et sensible, parti à la recherche d’un père absent, que chaque étape jalonnée de rencontres étonnantes. Une quête qui le fait un peu plus grandir et nous le rend d’autant plus proche et attachant.

 

Patrick