roman

Yasmina Khadra - L'écrivain   1/2

Pocket - 2003

 

 

    

    Puisque 2003 est en France l’année consacrée à l’Algérie, et alors que celle-ci vient de revenir une fois encore de manière tragique sous les feux de l’actualité, j’ai souhaité parler d’un écrivain algérien important, connu surtout pour ses romans policiers et sa fausse identité car Yasmina Khadra n’est qu’un pseudonyme, et donc pas un auteur féminin comme nous aurions pu le penser (son pseudo n’est autre que le nom de sa femme).

On lui doit notamment une fameuse trilogie noire, qui met en scène le commissaire Llob : Morituri – Double blanc – L’automne des chimères

Mais c’est dans L’écrivain paru en 2001 qu’ il révèle en fait son véritable patronyme et relate ses années de jeunesse, qui l’ont conduit à devenir un officier supérieur de l’armée algérienne après avoir suivi depuis sa plus tendre enfance les cours de l’école des cadets, El Mechouar.

 

    Jusqu’alors, il avait dénoncé dans ses livres la barbarie intégriste, la violence et la corruption devenues des caractéristiques majeures de son pays meurtri.

Cette fois, il choisit donc de raconter sa propre vie, l ‘éloignement de sa famille imposé par un père ambitieux et aimant, lui-même officier, les conditions très dures des premières années d’école, puis son écartèlement grandissant entre le monde des armées et celui des arts. Le livre n’est pas un jugement, mais un exposé clair et lucide de ce qu’étaient ces écoles militaires, où la discipline, l’impossible isolement et les brimades nombreuses constituaient le lot quotidien des élèves.

Le garçon timide, émotif, écorché vif devient un leader, un rebelle. Il commence à écrire des nouvelles, dirige la troupe de théâtre de l’école et se trouve de plus en plus confronté au choix crucial de ce que sera sa vie.

 

    D’abord désireux d’écrire en arabe, langue dont il vénère les écrivains et surtout les poètes, puis désavoué par un de ses professeurs, il opte alors pour la langue française.

Même s’il livre ici sa véritable identité : Mohammed Moulessehoul, il faut noter que Yasmina Khadra figure uniquement sur la couverture, preuve irréfutable que l’ancien officier a définitivement rejeté son ancienne vie et décidé d’écrire à jamais.

Auréolé de grands prix prestigieux des deux côtés de la Méditerranée, Yasmina Khadra écrit dans une langue poétique, réjouissante, pleine de sensations, naturelle sans laisser-aller et mérite ainsi largement d’ être découvert.

 

    Pas encore totalement rasséréné après sa confession, il donne en 2002 une suite à L’écrivain sous forme d’un essai intitulé L’imposture des mots, au ton nettement plus sombre et tourmenté, plus intime et moins spectaculaire. Curieusement, il essaie de redorer un peu son blason de militaire mis à mal dans l’opus précédent.

Et l’on sent alors combien cet homme aujourd’hui installé et reconnu dans son fauteuil d’auteur à succès demeure tiraillé, contradictoire, anxieux ; ce qui en fait à coup sûr un homme intéressant à l’écriture forte et séduisante.

 

Patrick