roman

Jack Williamson - Plus noir que vous pensez 1/2

Editions Joëlle Losfeld - 2004

 

 

 

   

    Pour être honnête et objectif, il convient dans un premier temps de rappeler que le livre dont il est ici question a une bonne soixantaine d’années. En effet, il a paru pour la première fois aux Etats-Unis en 1940. Il ne sortira en France que vingt et une années plus tard. Nous avons donc affaire ici à une nouvelle édition.

 

    Resituer l’époque de sa parution permettra sans doute de voir en ce roman policier et fantastique de bonne facture classique, mais efficace, une métaphore sur une actualité tourmentée. Nous y reviendrons un peu plus loin.

Will Barbee, journaliste à L’Etoile de Clarendon, est chargé d’écrire un papier sur le retour d’une expédition asiatique d’une petite équipe de scientifiques qu’il connaît fort bien, puisqu’il avait souhaité en faire partie lui-même dans le passé, sans que cette requête soit acceptée par le vieux docteur Mondrick. Celui-ci à sa descente d’avion s’apprête à des révélations de tout premier ordre qui pourraient bien changer le cours de l’humanité. Dans l’attente de leur arrivée, Barbee fait la connaissance d’April Bell, elle aussi journaliste, nouvelle recrue d’un concurrent. Immédiatement tombé sous le charme, Barbee lui livre quelques renseignements sur le docteur et ses amis, ainsi que sur l’objet de leurs travaux. La conférence de presse laborieuse et hésitante est soudain stoppée par la mort subite de Mondrick. Barbee, interloqué et curieux, se charge d’en trouver les causes et est bientôt pris dans un tourbillon où se mêlent rêves et réalités.

 

    Jack Williamson, par ailleurs réputé comme un des fondateurs de la littérature de science-fiction – on lui doit notamment Les Humanoïdes – donne un caractère résolument fantastique à ce roman haletant qui vous tient jusqu’à la dernière page. Il sait décortiquer les états d’âme et les humeurs de Barbee, son personnage central, solitaire et alcoolique, tiraillé entre son esprit pratique et son attirance amoureuse vers un monde onirique où affluent des lycanthropes assoiffés de vengeance et de reconnaissance.

Bien sûr, il faut accepter cette part d’irrationnel, propre à ce type de littératures. Mais Williamson maîtrise suffisamment bien son sujet pour le rendre cohérent et palpitant.

Cette lutte présentée de deux mondes, schématisant en sorte celle ancestrale et manichéenne du Bien et du Mal, prend après coup un écho étrange quand on a en mémoire l’actualité horrifique de cette époque et le développement des thèses eugénistes de Hitler. Dès lors, le roman de Williamson peut être aussi vu comme une parabole sur la folie de certains hommes et leur idée folle de race supérieure et dominante.

 

    Plus simplement, on peut aussi dévorer ce roman comme un bon bouquin de suspens, qui sait ménager ses effets et tenir son lecteur toujours surpris. Privilégiant les dialogues plus que les descriptions, Plus noir que vous ne pensez constitue un excellent moment de lecture, idéal pour un bel après-midi d’été ensoleillé.

 

Patrick