BD

Pauline Martin - La boîte     

Ego comme x - 32p, 5.95€ - 2000

 

 

 

    La boîte est l’histoire d’une double perte : celle de l’amour et celle de l’être aimé. Dans ce court album, Pauline Martin décrit le cheminement psychologique que l’on peut connaître en étant confronté au suicide d’un proche. L’histoire qui se déroule sur une période d’environ un an est celle d’une reconstruction.

 

    Pauline apprend de manière brutale la mort de son petit ami Giovanni. Il lui est difficile de faire son deuil car elle s’en veut de n’avoir su prévoir le passage à l’acte de son ami. Tout au long de l’histoire le souvenir de Giovanni la poursuit et l’empêche de vivre normalement. Et même si, Pauline réapprend à aimer. Si, le souvenir de son ex petit ami devient de moins en moins douloureux, il est toujours présent. Ainsi, quand Pauline jette la boîte qui contient tout ce qui la lie encore à Giovanni, elle sait bien que ce geste est inutile puisqu’elle se souvient de tout.

 

    La boîte est une bande dessinée très touchante et très forte sur le deuil. On peut s’interroger sur l’aspect autobiographique de l’histoire de Pauline Martin puisque l’on sait que beaucoup de bandes dessinées des éditions Ego comme x sont des récits de vie – on se souvient ainsi du Journal de Fabrice Neaud. Certains détails sont troublants : le fait que l’héroïne et l’auteur portent le même prénom, qu’elles soient toutes les deux dessinatrices. Mais peu importe, ce dont on peut être sûr c’est de la force et de la justesse de l’album. Pauline Martin, comme l’Américaine Debbie Drechlser ou la Québécoise  Julie Doucet, propose une écriture sans concession. Elle évoque ce dont on ose à peine parler d’habitude : ce que l’on ressent face à la perte de l’autre. Elle n’hésite pas à faire état de sentiments, de processus psychologiques parfois contradictoires : le déni de la mort, la culpabilité, la colère vis à vis de celui qui est mort, la peur de mourir, l’apaisement… Elle dit la solitude de celui qui reste, le désœuvrement proche de la folie, les remarques incongrues des proches, leur maladresse.

 

    Le dessin de Pauline Martin est à la fois très simple et très précis. Il coïncide avec l’esprit de la bande dessinée tout y est dit par petites touches, de façon très juste. Les motifs qui renvoient au monde intérieur de Pauline et servent à marquer les ellipses temporelles (les serpents, les spirales, les vagues…) rappellent l’univers de David B., auteur avec lequel Pauline Martin a d’ailleurs travaillé sur l’élaboration de Leonora .

 

   Le seul reproche que l’on pourrait faire à la dessinatrice concerne la manière abrupte dont l’histoire se clôt. On aurait aimé suivre Pauline un peu plus longtemps et la savoir heureuse, épanouie. Mais après tout, Pauline Martin ne nous rappelle-t-elle pas que faire son deuil peut prendre du temps ?

 

Stéphanie Pottier

 

Date de parution : novembre 2000

 

> Réagir sur le forum BD

 

Plus+

www.ego-comme-x.com