À la croisée du soft rock et de l’électronique expérimentale, Existentialism de DC Shell regorge de textes aux embruns contestataires.
En 2017 paraissait un ovni. Le jazz Acrylique, signé d’un certain Fontan, est un album de fuzz-rock urbain à écouter de préférence dans le canapé mythique de la Silver Factory de New York. L’album devait trouver refuge chez ZE Records, label culte et controversé qui accueille aussi bien John Cale, Suicide, ou Kid Creole and The Coconuts.
Derrière l’alias Fontan, on trouve DC Shell dont la reprise Cherchez Le Garçon de Taxi Girl sur la compilation Les Jeunes Gens Modernes (2008) avait fortement intrigué de par sa déconstruction. L’homme aux multiples visages est là où on ne l’attend pas.
Avec ce nouvel album Existentialism, DC Shell s’est paré de gants cloutés à l’électronique pour un voyage vers la planète soft rock 2.0. Sa voix sied à merveille au style, tel un mix entre Barry White et David Bowie en capitaines de vaisseaux. Le sensuel Interior Exile, lancinant comme un yacht sur une mer de velours, pose la guitare acoustique en boussole, guidée par des sons nappés de violons et de saxo. Le timbre grave et chaud de DC Shell nous guide les yeux fermés dans un océan de plénitude électro parfait pour les préliminaires. Quelques touches d’acid jazz et voici que No Factories Shut Down, un slogan de lutte sociale signé Max Francis Bennet, engage une relation trouble avec un groove soyeux. Qu’aurait adoubé Adolphe Sax à l’écoute d’On The marble Cliffs. Quelques expérimentations sonores acoustiques et des synthétiseurs donnent le change à la voix pour un tour en orbite analogique. Avec une approche plus mélancolique qui dénonce les dérives autoritaires et ses conséquences, Talk To The Liberteria est transcendé par des vocalises et des nappes de violons envoutants.
Un peu d’Auto-Tune pour décrire la mélancolie des exilés, et Night Platform roule sur l’eau, irradié par un Sunset électronique groovy à la Happy Mondays. Pendant que Starcoal-Charbon étoilé se joue d’un piano jazzy-soul qu’une instrumentation à la Air va projeter dans un cosmos bienveillant.
Theme From The Zeitgeist parade en version cool-jazz qui sied parfaitement à DC Shell. Embarquement vers un lointain fantasmagorique à l’ambiance moite qui aurait dû servir à une B.O d’un long métrage, tout comme Morning Messenger qui vogue vers des sons plus expérimentaux.
Plus loin, le charme opère avec Philisitines, une balade piano-voix réconfortante, inspirée par les chants contestataires jamaïcains. L’invisibilité sert de thème à Presence Of The Unknown et le piano en est le fil conducteur soumis à bon nombres d’effets tandis que sur Nature Boy, les cordes enivrantes scellent le destin, chant et saxophone sont vent debout contre la sinistrose.
Un poing serré pendant que l’autre caresse, DC Shell prône un militantisme sonore expérimental chic.
Mathieu Marmillot
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