De vieux fantômes reviennent hanter Fin MacLeod, héros de la Trilogie écossaise. Des secrets enfouis ressurgissent tandis qu’il tente de prouver l’innocence de son fils Fionnlagh, accusé de meurtre.

Peter May reprend la plume pour nous embarquer à nouveau sur les îles Hébrides, une quinzaine d’années après la parution des trois polars qui composaient la jusqu’alors bien nommée Trilogie écossaise : L’île des chasseurs d’oiseaux, L’homme de Lewis et Le Braconnier du lac perdu.
Fin MacLeod, que l’on a connu flic dans les opus précédents, a désormais quitté officiellement la police. Il est installé à Glasgow avec Marsaili, son amour de jeunesse. La vie suit doucement son cours, avec ses hauts et ses bas, jusqu’à ce qu’un coup de fil fasse exploser toutes leurs certitudes. Fionnlagh, leur fils maintenant professeur, est parti revivre sur l’île de Lewis avec femme et enfant. Il est accusé du meurtre d’une jeune femme de 18 ans, Caitlin Black, qui était son élève.
Malgré les preuves accablantes, Fin et Marsaili retournent sur l’île après des années d’absence dans l’idée de l’innocenter ou du moins de comprendre ce qui s’est réellement passé.
Peter May n’a rien perdu de son talent de conteur pour faire sentir au lecteur les embruns et l’odeur de tourbe de l’île la plus septentrionale de l’Ecosse. L’immersion dans les décors de l’île, composés de landes et de falaises, est totale et donne furieusement envie de découvrir cette partie de l’Ecosse encore sauvage.
La dureté de la vie insulaire est palpable, tant par la description du caractère de certains personnages que par les traditions qui sont encore ancrées dans la vie quotidienne. Ile régie par la branche calviniste, avec plusieurs églises dans chaque village, le sabbat est encore scrupuleusement respecté. Point de distraction le jour du Seigneur !
L’intrigue est très bien ficelée et reprend la construction des livres précédents, alternant entre passé et présent. Il n’est pas obligatoire d’avoir lu la Trilogie écossaise pour lire Loch noir. Si vous le souhaitez, vous pouvez vous (re)plonger dans L’île des chasseurs d’oiseaux avant de découvrir ce nouvel épisode. Les deux polars se répondent parfaitement au niveau des intrigues et des souvenirs qui émaillent le récit.
Si L’île des chasseurs d’oiseaux se penchait sur les traditions ancestrales, Loch noir aborde des thèmes très actuels comme la protection de l’environnement et la production industrielle piscicole. Peter May rend ces sujets très concrets en les mettant au cœur de l’intrigue.
Au-delà du caractère très plaisant du polar, cette désormais suite écossaise pourrait revendiquer le titre de « saga » au sens nordique du terme. Elle raconte un peuple insulaire, sa vie et son combat pour le respect des traditions. Les prénoms gaéliques (dont l’écriture ne correspond jamais à la prononciation, vous en avez l’exemple sur une double page à la fin du livre !) et les termes propres aux îles Hébrides renforcent l’identité de ce territoire et son ancrage dans la culture celte.
Il aurait pu s’agir du livre de trop ajouté à cette trilogie au succès indéniable, il n’en est rien. Le come back est brillamment réussi. Le lecteur se glisse dans l’intrigue comme il retrouve un vieil ami qu’il n’a pas vu depuis quinze ans tout en ayant l’impression de l’avoir quitté la veille.
Well done, Mister May !
Caroline Martin