Les séries Marvel de l’ère Disney sont loin d’être des grandes réussites. A ce jour seules Loki et Wandavision ont réussi la gageure d’intéresser le public et la critique, en mélangeant esprit des comics, esthétique MCU spécifique et scénario étonnant. Ironheart, sorte de rajeunissement du mythique Iron Man, tente de tirer son épingle du jeu…

Démarrons cette chronique avec un détour par les Comics. Vers 2016, la maison des idées essaie par plusieurs moyens de rajeunir le public des périodiques, un peu vieillissant, à l’instar de l’auteur de cette critique. C’est à cette époque que naît l’idée de rajeunir aussi les héros Marvel. Ainsi naissent dans les hebdos des personnages comme Viv Vision, synthésoïde créé sur base de Vision père et une équipe de jeunes Champions, dans lesquels on peut croiser Ironheart, Amadeus Cho (un jeune Hulk), Kamala Khan (Ms Marvel), Miles Morales (Spiderman) etc. Le personnage de Riri Williams naît donc d’une volonté de donner un coup de jeune à la franchise. Elle conserve ce rôle au sein du MCU.
Disney + récupère la plupart de ces jeunes Champions : Ms Marvel a sa mini série, Echo la mutante qui convoque les esprits et lutte contre Tonton Fisk aussi, Miles Morales a son film d’animation en accord avec Sony… Et voilà que déboule Ironheart en univers télé après une rapide incursion dans le Black Panther 2 où la jeune étudiante du MIT créatrice d’exosquelettes aide le peuple wakandais et sa régente Shuri (encore une jeune…) à lutter contre Namor. Il semble que le personnage ait été bien accueilli par les spectateurs dans le film : Elle a donc sa série à elle. Et peut-être, pense-t-on, comme dans les comics la lourde tâche de succéder à Stark / Robert Downey Jr dans le rôle d’un Iron quelque chose.
Dans cette courte série en 6 épisodes, qui débute au moment ou Riri Williams (Dominique Thorne) se fait jeter du MIT et de la bourse Stark, est racontée toute la genèse de sa nouvelle armure. Sa construction, l’intégration d’une IA dans la carcasse de métal, liée à « l’origin story » de l’héroïne, et forcément aussi des méchants antagonistes contre qui elle finit par devoir se battre. Ils sont ici incarnés par The Hood, son frère d’armes ainsi qu’une brochette de jeunes rebelles, hackeurs, voltigeurs et autres génies du mal pourtant plutôt stylés, qui rackettent des magnats des startups peu éthiques, pour se créer un petit pactole personnel. Une jeune, une armure, un méchant, The Hood (Anthony Ramos) au pouvoir maléfique croissant… tu sens venir la routine scénaristique ? Oui, et tu n’as clairement pas tort. Cette série de super héroïne est de facture scénaristique classique, et n’apporte pas grand chose au schmilblick en la matière.
Alors ? Une série ratée de plus, au catalogue Disney+ ? Oui et non. C’est sûr : Ironheart n’est pas révolutionnaire, ni vraiment globalement inventive. Mais, parce qu’il y en a un, n’est pas non plus le ratage auquel tu t’attends à ce stade.
Il y a d’abord une esthétique du film qui démontre que le MCU sait s’inspirer de ses propres cartons pop. L’esthétique pop / soul / rap urbaine, dessinée dans les Spiderman de ces dernières années, inspire clairement l’ensemble. Ironheart en retire aussi un rythme teenager, une bande son, et des références « street » qui se marient bien à la manière de filmer Chicago où est sensé se dérouler l’intrigue. Le rythme, les personnages, aux exigences et looks contemporains, amènent de fait une réelle modernité à l’ensemble. L’image est belle, les effets spéciaux plutôt sobres, et apportent une réelle jeunesse à cette histoire pourtant traditionnelle. Un flow. C’est suffisamment notable quand on met en face Echo, ou Faucon et le Soldat de l’hiver, par exemple, qui semblent avoir été filmés à un autre siècle.
Et il y a ensuite, et surtout, ce qui ressemble à une remise en question des rails prévus initialement pour le MCU chez Disney. Là où on s’attend à ce qu’on comprenne à un moment comment Ironheart suit les traces de Tony Stark… Il semble que la mini série serve en fait d’aiguillage double pour la suite de l’univers Ciné Tv Marvel. Après le ratage de Ant Man Quantummania où Paul Rudd devait se battre contre Kang… Après le renvoi de Kang incarné par Jonathan Majors condamné pour violences conjugales… le MCU se trouve en manque de « grand méchant capable de succéder à Thanos ».
C’est pourquoi, quand arrivent les derniers épisodes de la série, où on apprend ce qui motive le jeune « The Hood » dans son machiavélisme addictif et d’où il tire son grand méchant pouvoir, il y a une forme de jubilation adolescente : « ah ouais, chouette, le grand méchant a un charisme de grand méchant ». Est alors offert un choix cornélien à la super héroïne, comme un bon comics saurait le faire, avec une décision pas forcément téléphonée. Et je ne suis pas sûr que les premiers scénarios développés pour Ironheart prévoyaient cette complexité. C’est une bonne idée qui épaissit un peu les personnages principaux.
Est-ce qu’un rythme contemporain et l’avènement d’un vilain sont des ingrédients suffisants pour faire sortir Ironheart du lot des sorties Marvel à la saveur mitigée ? Le doute est permis.
Néanmoins je mentirais en disant que je me suis ennuyé à suivre ces 6 épisodes. Et de fait, j’ai un peu envie de savoir comment Ironheart va se sortir de la situation diabolique dans lequel le MCU la plonge dans l’épisode de fin de saison.
Denis Verloes