Deux ans après le Vertigo de Wand, sa principale force créatrice, Cory Hanson, nous revient avec un nouvel album solo qui s’avère totalement différent de son prédécesseur Western Cum, mais confirme son éclectisme et un impressionnant talent de compositeur.
Cory Hanson s’était positionné sur Western Cum comme le digne fils spirituel du Neil Young électrique : morceaux gorgés de guitares, un Driving Through Heaven de 10 minutes qui aurait été taillé sur mesure pour Crazy Horse. Ces cavalcades de guitare ont été également de mise lors de son dernier concert parisien. Quelques jours après le passage du maître à Paris, l’écoute de I Love People peut surprendre celui qui n’est pas au fait du coté éclectique de Hanson. De fait, ce nouveau disque se situe plus dans la lignée de Pale Horse Rider, sorti en 2021 et qui avait en premier attiré l’attention sur le cas Hanson en solo. Là où les derniers travaux de Wand ont une touche expérimentale, Hanson semble réserver pour sa carrière solo des compositions plus évidentes. Preuve de la qualité des musiciens, son backing band sur le disque n’est autre que… les gars de Wand : Evan Backer à la basse, Evan Burrows à la batterie, renforcés par Ryan Parrish au saxophone. Robbie Cody est quant à lui crédité à la production, et Hanson se réserve le piano (et il y en a beaucoup) et la guitare.
Sorti en single il y a quelques semaines, le single sobrement intitulé Lou Reed était annonciateur de la qualité globale de l’album : ode à son héros sur fond de piano, saxophone et basse avec une atmosphère à la Coney Island Baby, le morceau est particulièrement touchant avec un sax rappelant Walk on a Wild Side et Hanson faisant l’éloge de Lou Reed en prince combattant.
Sur tout le reste de l’album, nous sommes pourtant loin d’une atmosphère new yorkaise, tant il est baigné d’une atmosphère West Coast/Laurel Canyon.
Le premier morceau Bird on a Swing s’inscrit dès le départ dans un rock californien années 70, avec tout ce que ça comporte d’harmonies. Ne pas se fier à cette félicité apparente, Hanson se caractérise comme « A troubled bitter soul / I’ve got sadness in my skull ». On a un peu de mal à trouver une influence Lou Reed ici, Elton John est manifestement un autre des héros de Cory Hanson.
Dans la même veine, Joker a la même évidence mélodique mid-tempo renforcée par le saxophone, mais avec les mêmes paroles plus sombres. Le titre I Love People convoque quant à lui le Randy Newman de I Love LA, par ses touches de piano et ses paroles sarcastiques. C’est loin d’être le meilleur titre du disque, trop répétitif, et la guitare de Hanson nous manque terriblement. Le violon ouvre le très orchestré et court I Dont’ Believe You aux arrangements soyeux. Pas de doute, Neil Young est très loin sur ce titre. Également rempli de violons, de cordes et de piano. Santa Claus is Coming Back to Town est tout sauf une chanson de Noël joyeuse, le narrateur, « lonely as a stranger / or a Catholic in hell » étant un soldat rentrant d’Afghanistan. Final Frontier aurait pu figurer sur l’album western de Springsteen, on imagine un générique de fin après la mort du héros, Cory Hanson y chante particulièrement bien.
Sur Texas Weather, la vibe country rock à la Eagles fait mouche, cette approche country étant renforcée par la pedal steel sur On the Rocks à la fin de l’album. Là encore, les paroles sont plus troublantes que la musique, le narrateur étant carrément en train de boire un coup avec…. le Klu Klux Klan ! On ne peut enfin pas passer sous silence Bad Miracles. Seul morceau qui aurait pu éventuellement figurer sur Western Cum, il détonne par son solo de guitare venant interrompre le piano et apporter une touche électrique plus que bienvenue.
Avec cet album étonnant, Cory Hanson confirme sa présence dans le cercle des songwriters à suivre. Il sera particulièrement intéressant de voir comment les titres de cet album seront arrangés pour la scène et la place qu’il y accordera à sa guitare.
Laurent Fegly