BENZINE  

 magazine d'essence culturelle

 

 

 

 

roman

Entretien avec Jean-Philippe Blondel

 

 

 

 

    

Auteur d'un livre choral aux personnages et situations multiples et entremêlées (Accès direct à la plage), Jean-Philippe Blondel, professeur à Troyes, nous parle de ses motivations et inspirations d'écrivain, et nous livre aussi quelques-unes de ses influences et son goût pour la nature humaine.

 

Qu’est ce qui vous a poussé à écrire ?

A écrire, en général, je ne sais pas très bien, c’est là depuis si longtemps… à écrire ce livre en particulier, ce sont des vacances en Bretagne qui ne se sont pas très bien passées parce que la propriétaire de la maison que nous louions n’arrêtait pas d’intervenir dans nos conversations pour raconter sa vie, elle a donné naissance à ce personnage finalement beaucoup plus attachant que son inspiration humaine – Natacha/ Maud/ Danièle

 

Pourquoi avoir choisi le mode « choral » avec une multiplication de personnages et d’endroits imbriqués ?

Je tenais absolument à écrire un roman à la fois très facile d’accès (quant au style) et plus ludique et agaçant quant à la structure – afin d’obliger le lecteur qui voudrait dévorer à revenir en arrière ou à relire une deuxième fois. Je voulais aussi les côtes françaises – le reste s’est créé au fur et à mesure – comme un puzzle.

 

Les villes de villégiature côtières semblent avoir votre prédilection. D’où vous vient ce goût-là ? Connaissez-vous les quatre endroits physiquement ? Y avez vous écrit le livre par exemple ?

Je connais évidemment ces quatre stations balnéaires et elles me rappellent, toutes, des souvenirs particuliers. J’étais à Capbreton en 72, à Hyères en 82, etc... mais l’autobiographie s’arrête là. Le goût de la mer ? Qui ne l’a pas ? A fortiori quant on habite l’Est – même si je suis très attaché à ma région.

 

Le livre est court, réussissant en quelques lignes à forger un personnage et son caractère et on vous sent assez en empathie avec tous vos personnages. Comment avez vous travaillé à ce roman (plan, schéma ou invention progressive ) ? Cela vous a t-il pris beaucoup de temps ?

J’aime le mot empathie. Je pense qu’il est essentiel dans l’écriture – je supporte mal la distanciation et l’ironie – à moins qu’elle ne soit tendre. Nous faisons tous partie d’une humanité et, comme l’écrit Bouvier dans les Chroniques Japonaises, «  courage, on est tous relié mais on oublie de s’en souvenir ».

Il n’y a pas eu de plan – pas vraiment. La première période s’est mise en place – puis la seconde – je n’avais pas envie de laisser de côté certains personnages, alors voilà. Le roman a été écrit en 3 mois – il a été peu retravaillé pour l’édition.

 

La description des traits de caractères très étendus révèle une connaissance certaine de la nature humaine dont vous ne brossez pas toujours d’ailleurs un tableau très reluisant. Est-ce votre métier de professeur qui vous l’a donné ?

Plutôt la quarantaine et l’expérience que le professorat, qui est dans mon cas, un bonheur quotidien. Je suis persuadé que nous avons tous cette connaissance. Installez-vous à la terrasse d’un café, regardez passer les gens, écoutez-les, vous avez tous les romans de la terre qui défilent.

 

Les personnages sont-ils totalement inventés ou avez-vous utilisé votre vécu, sinon votre propre vie ?

Je suis – et ma vie est- dans tous et dans aucun des personnages. Ce n’est pas une pirouette. A part la fameuse Maud/Natacha, le seul personnage que j’ai réellement croisé, c’est Francis Rozé ; l’agent immobilier…j’écrivais au moment où ma femme et moi cherchions une maison, il s’est intégré au paysage – mais en fait, j’ai inventé tous les détails de sa vie. J’ai seulement gardé son nom ( pas son prénom), en hommage.

 

Vous reconnaissez-vous des influences : littéraires, cinématographiques ou autres ?

Bien sûr. Je suis un grand lecteur depuis longtemps, mais très éclectique. J’aime autant Echenoz, Modiano que Jay Mc Inerney, Auster, que Benacquista et Piccouly et puis encore Virginia Woolf et Proust et Helen Fielding (Bridget Jones) et Nick Hornby et Kerouac… J’assume le fait d’être un tissu d’influences…mais ce qui m’influence le plus au moment de l’écriture, c’est la musique. J’écris sous casque, je me débarrasse des chansons qui me hantent, La Baie de Daho sur Accès Direct, les Smashing Pumkins et Graziela de Michèle sur 1979, U2 ensuite…

 

Vous êtes publié chez un « petit » éditeur : Delphine Montalant. Avez-vous éprouvé des difficultés pour la publication de votre roman ou s’agit-il d’un choix délibéré ?

J’ai beaucoup envoyé depuis des années. J’envoyais à beaucoup de maisons – il ne faut pas en avoir honte. Delphine a répondu positivement – tout de suite.

 

Accepteriez vous une adaptation au cinéma de votre livre ?

Oui, bien sûr, mais je ne vois pas comment cela peut-être fait. Trente ans, vingt personnages. Il faudrait un Altman français.

 

Vous publierez cette année votre second roman 1979. Pouvez-vous déjà nous en parler un peu ?

Un jour, vous ouvrez vos volets et quelqu’un sur le mur en face de chez vous a graffité à la peinture rouge une date.1979. Un peu de rouge a coulé sur le sept.

Qu’est-ce que vous en pensez ?

Et d’ailleurs, vous faisiez quoi, vous, en 1979 ?

Il y a un narrateur puis 9 narrateurs, puis 7 (les mêmes moins 2 qui ne peuvent plus parler) puis 9 (encore les mêmes).

Ce roman a été un bonheur d’écriture.

 

Propos recueillis par Patrick - janvier 2004 -