Venezuela, de Jochen Jung

jung.jpgTout d’abord, la couverture éveille la curiosité : un auteur allemand, le titre d’un pays d’Amérique latine, et la photo d’un couvre-chef nazi. Puis le livre, sous-titré »petit roman » et sa centaine de pages.

Ensuite, la première partie du roman, une succession de rebondissements truculents servis par un style littéraire soutenu mais drôle à  souhait. On pense très vite aux romans humoristiques anglais comme Trois hommes dans un bateau entre autres. L’art de Jung réside dans la distanciation un peu cynique mais tendre qu’il installe sur un scénario improbable : Alfredo Guzman est gynécologue sur une base aérienne nazie. Il n’a qu’une patiente, la femme du général de la base, dont il devient rapidement l’amant torride, jusqu’à  ce qu’on le surprenne dans un moment intime. Le voyeur, c’est aussi le roi des avions de l’époque, Udet, qui cependant est aussi le roi des particularismes anatomiques : il confie auparavant à  Guzman, lors d’une visite routinière d’éventuelles maladies vénériennes, qu’il n’a qu’une seule testicule. Secret pour secret, avant que n’éclatent les scandales,, Guzman n’a plus qu’une issue : s’enfuir loin de cette agitation, avec l’aide d’Udet. Et direction le Venezuela, pays inconnu de lui mais où il espère retrouver celui qui lui a donné ce prénom assez peu usité en Allemagne…

C’est dans cette deuxième partie, l’expédition de Guzman en terre latino-américaine, que le roman prend une tournure plus convenue, même si toujours aussi délectable : la farce originale devient un voyage initiatique assez classique, où les retrouvailles père-fils auront bien lieu, mais de manière (comme toujours) inattendue… quoique…

On regrettera donc un peu que Jochen Jung, dont le style épate aux premières pages, ne continue pas tout du long d’en mettre plein la vue tout en restant décalé et amusant dans sa description de situations rocambolesques. Au final, Venezuela reste extrêmement plaisant et original, malgré son manque d’ampleur et son final que l’on aurait aimé grandiose, à  l’image de l’introduction, comme par exmple la première phrase : »Mon père était nazi, c’était indiscutable. Il a toujours fait le mauvais choix.. »

Jean-François Lahorgue

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Venezuela, de Jochen Jung
Editions Métailié, 105 pages, 16 €¬
Traduit de l’allemand par Françoise Torraille
Date de parution : octobre 2008.

2 thoughts on “Venezuela, de Jochen Jung

  1. Merci pour cette critique. Vous évoquez à plusieurs reprises le style de Jung. Peut-être serait-il bon de mentionner le nom de sa traductrice, qui vous a permis de le découvrir en recréant ce style en français (il s’agit de Françoise Toraille). C’est au moins aussi important que la date de parution, non?
    Cordialement,
    Olivier Mannoni

  2. Effectivement, j’oublie tout le temps de mentionner les traducteurs de livres étrangers, qui font, comme vous, un travail considérable même si peu reconnu du grand public, à part Brice Matthieussent.
    Je corrige cela immédiatement, pour tous les livres que j’ai chroniqués.
    Cordialement,
    Jean-François Lahorgue

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