Tu verras, de Nicolas Fargues

Le »tu verras » de l’auteur s’adresse au fils unique du narrateur, à  cet adolescent qui a perdu la vie bêtement en passant sous une rame de métro alors que rien ne semblait le prédestiner à  une telle fin »comme d’ailleurs tous les enfants en bonne santé dont les parents font tout pour leur assurer une éducation et une vie confortable loin de tous les dangers »qu’ils croient !
Enfant de son époque, Clément a des parents divorcés, porte pantalon taille basse et ipod aux oreilles, il est fan de rap et bien profilé sur Facebook. Il vit chez un père protecteur qui essaie tant bien que mal de comprendre son fils et de lui inculquant certaines valeurs essentielles. Quelques temps après la disparition de Clément, ce père découvre un poème secret qui pourrait peut-être expliquer la mort brutale de Clément.

Si l’on peut le voir comme réflexion sur l’éducation, sur les rapports père/fils, sur la façon d’appréhender le décès d’un enfant, le roman de Nicolas Fargues est surtout un bel observatoire de notre époque. Avec un oeil aiguisé, il nous renvoie sans cesse à  notre quotidien, à  notre statut de parent, d’éducateur, face à  nos enfants, devant sans cesse jongler entre le futile et l’essentiel, entre les marques d’affection et les privations.
Heureusement pas autobiographique, »Tu verras » a inspiré l’auteur quand l’un de ses deux enfants s’est fait renverser, sans conséquence, par une voiture. Il a tiré de cet événement un roman en forme de bilan, à  la fois juste et touchant, mettant le lecteur à  contribution dans sa propre réflexion face au rapport qu’il peut entretenir à  la mort ou dans la façon dont il envisage l’éducation de sa descendance.

Fin observateur de ses contemporains, Nicolas Fargues nous gratifie de situations et de descriptions criantes de vérité dans lesquelles chacun pourra s’y reconnaître à  un moment ou un autre. Et plutôt que de se montrer larmoyant ou sinistre dans le ton autant que dans le style, »Tu verras » se révèle en fin de compte plutôt léger, tout en gardant une part de profonde gravité en lui, et sans jamais se montrer moralisateur. Au fond, un bel exercice d’équilibre.

Benoit Richard

Tu verras, de Nicolas Fargues
Editions P.O.L.
193 pages -15.50€¬
Parution : Février 2011
Prix France culture /Télérama 2011