The Sex Pistols – The Original Recordings : Pour le meilleur et pour le pire

Et une compilation de plus ! The Original Recording par The Sex Pistols accompagne la mini série Pistol de Danny Boyle, et revient sur leur trajectoire musicale éphémère et chaotique.

Sex-Pistols
Sex Pistols © Aaron R

 « Avez-vous quelque fois l’impression de vous être fait avoir ? » Ce fut les mots du chanteur Johnny Rotten lors du dernier concert des Sex Pistols à San Francisco le 18 janvier 1978. C’est aussi la question que l’on peut se poser en abordant cette nouvelle compilation intitulée faussement The Original Recordings. On y retrouve quasiment l’intégralité de leur unique album Never Mind The Bollocks, Here’s The Sex Pistols, sorti en 1977, à l’exception de EMI, Seventeen et Liar. Quelques titres issus de la B.O. de The Great RocknRoll Swindle, et des faces B de 45T sont rajoutés au menu. Rien de neuf donc sous les spiky hairs et crachats. Mais ces titres auront marqué durablement la fin des 70’s et influencé autant Joy Division, Oasis que Nirvana ou The Prodigy. Toujours est-il qu’avec la série Pistol diffusée sur Disney + et le jubilée de platine d’Élisabeth II, les Sex Pistols refont parler d’eux et se retrouvent meilleur vente de single en Angleterre.

sex-pistolsLeur unique disque à la pochette jaune et rose fluos peut s’enorgueillir d’être l’ultime album punk. La raison est simple. De bonnes compositions, un chanteur à la gouaille exceptionnelle et un son digne d’une panzer division. Justement ce son, on le doit à Chris Thomas qui avait déjà bossé avec les Beatles, Roxy Music ou Badfinger. Les démos enregistrées auparavant par Dave Goodman ne plaisent ni aux labels, ni à leur manager Malcolm McLaren qui lui préfèrent un gars qui a de la bouteille. Evidemment Goodman va se venger en faisant fuiter bon nombre de disques pirates, voir même des faux bootlegs. En studio, Chris Thomas va mettre le paquet sur la section rythmique. Il  va commencer par rendre la batterie de Paul Cook explosive et faire sonner les cymbales comme des coups de feu. Il fait enregistrer au guitariste  Steve Jones un paquet de pistes pour combiner urgence rock’n’roll et sève mélodique. C’est toujours Jones qui va s’occuper de la basse,  exception faite du premier 45t Anarchy In The Uk, enregistrée par Glen Matlock avant qu’il soit viré du groupe. Sid Vicious (1957-1979), le nouveau bassiste, soigné pour une hépatite, ne peut pas se rendre aux sessions d’enregistrements, sauf pour un seul titre, Bodies, que Jones va rejouer discrètement. Afin d’optimiser la voix venimeuse de Johnny Rotten, le producteur opte pour un simple micro SM 58, que le chanteur tient dans ses mains. La déflagration est énorme, jamais un chant aussi agressif, politique et moqueur n’a eu autant de répercussion sur la musique.

L’album sonne comme une forme de hard-rock, sans les solos, qui puise un peu dans le glam et dans quelques groupes 60’s et 70’s comme The Small FacesThe Stooges ou The New York Dolls. Mais avec ce truc incomparable à la fois tribal, malsain et violent. Les quatre singles Anarchy In The Uk, God Save The Queen, Pretty Vacant et Holidays In The Sun seront les étendards d’une génération en colère. On note une légère évolution du son qui devient plus compact entre le premier et le dernier single. Bodies, Problems, No Feelings, I Wana Be Me sont une foire aux riffs maltraités par un chant névrosé. Submission, Did You No Wrong et New York pâtissent de la qualité des titres précédents et paraissent  faiblards. No Fun et Satellite, deux faces B non retenues pour l’album viennent confirmer toute la morgue du groupe.

La première est une reprise d’Iggy and the Stooges qui balaie tout, pendant que Satelitte met sur orbite la guitare de Jones et la perfidie de Rotten. Les reprises chantées par ce dernier, Substitute des Who et (I’m Not Your) Stepping Stone de Paul Revere and the Raiders, datent de 1976 et sont honorables en comparaison de celles chantées par Sid Vicious, Cmon Everybody et Something Else d‘Eddie Cochran, que My Way, popularisé par Sinatra, surpasse dans la dérision. Après la séparation du groupe, Cook et Jones ont composé deux titres assez inoffensifs, plus power pop pour le Lonely Boy et classique rock pour Silly Thing. Tous ces titres proviennent de la B.O du film The Great RocknRoll Swindle, sorti en 1980.

La sortie de Original Recordings et de la série Pistol n’a évidemment pas été du goût de Johnny Rotten, devenu John Lydon depuis, qui a perdu un procès intenté par Jones, Cook et Matlock. Non seulement le biopic (dont la chronique est lisible ici) s’est inspiré de l’autobiographie de Steve Jones Lonely Boy – Tales from a Sex Pistols paru en 2017, mais  le choix de la tracklist de cette compilation est sujet à caution. Que viennent faire là des reprises et titres enregistrés après la fin du groupe, donc amputés de leur chanteur ?

« Cette série est contre tout ce que nous défendions autrefois »  Cette formule du chanteur s’applique aussi pour cette compilation très inégale. On lui préférera définitivement le désormais classique Never Mind The Bollocks, Here’s The Sex Pistols.

Mathieu Marmillot

The Sex Pistols – The Original Recordings
Label : UMC
Sortie le 27 mai 2022