Ce lundi soir, la salle de concert colmarienne offrait une affiche improbable. Celle réunissant Lol Tolhurst et Miki Berenyi, soit l’ex fondateur de The Cure et l’ex chanteuse de Lush et Piroshka.
Il est 21h lorsque Tolhurst s’installe derrière sa batterie, suivi d’Oliver Cherer à la basse, casquette vissée sur la tête, et d’un grand dadais moustachu à grosse lunette. Qui n’est autre que son fils, Gray Tolhurst guitariste et chanteur, déjà repéré au sein du groupe californien cold wave Topographie. Le jeu implacable et minimaliste du batteur annonce une setlist qui va puiser dans le répertoire de The Cure.
The Holly Hour en est le premier titre tiré de l’album Faith (1981). La basse et la guitare reproduisent bien le son flanger et chorus de l’époque. Mais lorsque Gray s’empare du micro, le petit miracle se produit. Sa voix se rapproche beaucoup de celle d’un jeune Robert Smith. Pas démonstratif, le trio surfe sur l’émotion. S’en suit A Forest, fidèle à la version originale bien qu’avec un jeu de guitare plus minimaliste. Lol Tolhurst ne boude pas son plaisir, joue concentré avec une force tranquille impressionnante. Et c’est au tour de quelques extraits de l’album Pornography (1982). Siamese Twins retrouve son spleen malsain, Gray plus vrai que nature chante avec détachement. Puis Miki Berenyi monte sur scène pour l’iconique Strange Day, à vite oublier. Elle se rattrape sur le nouveau titre collaboratif Stranger, un écrin shoegaze pop qui percute bien. Lol Tolhurst assure une rythmique bien en verve qui trouve son apogée avec le tribal Hanging Garden, empli de désespoir. Une dédicace à la grand-mère de Gray, et les Tolhurst embrayent sur un All Cats Are Grey (Faith 1981) mélancolique à souhait, qui annonce le dernier titre. Ce sera 10.15 Saturday Night, extrait du premier album de The Cure. Une version nerveuse avec ses quelques petits pains à la guitare dont le père ne tiendra pas rigueur, le fiston n’en menant pas large. Les nombreux fans de The Cure présents dans la salle ne boudent pas leur plaisir.

Autour de Miki Berenyi Trio d’enchaîner rapidement. Le set puise majoritairement dans le nouvel album Tripla. Sur scène, on retrouve donc Miki Berenyi au chant et à la guitare douze cordes, le bassiste Oliver Cherer et l’immense guitariste pionnier du shoeazing et ex-Moose : K.J. McKillop. Passé un Hurricane en introduction qui laisse présager la teneur et le son du concert, c’est avec une belle version de For Love signée Lush que les anglais se font cohérents. Aidé d’une boîte à rythmes et de nombreuses séquences pré-enregistrées dont des voix, le trio déroule son set avec appétit. McKillop reste concentré sur ses accords tarabiscotés et noyés dans des effets dream-pop, Cherer est au taquet et Miki Berenyi partage son enthousiasme avec le public, à défaut d’une interprétation totalement convaincante. Il faudra attendre le single 8th Deadly Sin pour que l’on retrouve cette classe d’antan et surtout l’impeccable Scratching At The Lid, unique extrait de l’album signé Piroshka, qui reste le meilleur moment de ce concert marqué par un indéniable esprit friendly.
Texte : Mathieu Marmillot
Photos : Deadly Sexy Carl et E.F