La Flemme – La Fête : Demain, c’est (pas si) loin

Entre énergie punk festive et pop-garage désabusé, les quatre jeunes marseillais de La Flemme se donnent les moyens de devenir l’une des promesses rock de la scène française avec La Fête, premier album brûlant, joyeux et bigrement bien foutu.

Lenaic Lannoy

La Flemme se sont quatre musicien.nes venus tout droit de Marseille : Jules, Stella, Ronie et Charles. Les deux premiers se partagent le chant, et le quatuor mène de front les instruments qui s’entrechoquent et se superposent pour causer un fracas, mélange de rock nerveux à tendance punk et garage sous ambiance joviale. Après un EP sorti fin 2024, le groupe décide d’enchainer très rapidement avec un premier disque publié chez Exag’ Records, naturellement intitulé La Fête.

Dès le morceau d’ouverture, le ton est donné : une ligne de basse sourde, des guitares frondeuses et un chant scandé aux allures de slogan « les jeunes veulent faire la fête » pour 1min30 brute, qui plante le décor à venir. L’enchaînement avec Oiseau ne fait que confirmer cette sensation d’être happé dans un tourbillon bouillonnant, divertissant, enivrant hyper intense. Un énorme bruit de larsen lance le morceau où l’on rencontre une autre facette très intéressante du band : sa capacité à sonner mélodique et pop dans le tumulte.

Des textures différentes, bienvenues, qui évitent de s’enfermer dans un écrin uniforme. Preuve dès le titre suivant, Laissez-moi Tranquille, sans aucun doute le temps fort, et celui capable d’ouvrir quelques portes au groupe. Le chant un peu surf de Stella Lopez fait effet de contre-point à l’énergie autour avec une mélancolie faussement détachée. A l’inverse,  les morceaux incarnés par Jules Massa sont plus francs du collier et vont à l’essentiel (Marre de Vous, Le Petit du Camas), et cette alternance entre urgences bruyantes et instants suspendus font tout le sel de La Flemme.

La force du disque, c’est cette dichotomie constante entre effet joyeux et effet désabusé, cette façon d’évoquer l’envie de s’amuser et son rejet, les contradictions d’une génération qui ne sait jamais sur quel pied danser et qui ne veut pas choisir. Malins, ils ont construit ce disque de manière à ce que cette fameuse fête, d’emblée trop bruyante se transforme petit à petit en une gueule de bois douce-amère. Mer Azur marque en ce sens cette rupture, ralentit la cadence sous la rythmique de la batterie malgré des saturations de guitares et l’ambiance, déjà, change en quelque chose de plus psyché.

Sentiment renforcé sur Tunnel, long morceau instrumental qui flirte dans sa construction avec un esprit krautrock lourd et poisseux. Témoignage de l’ambition des sudistes à s’emparer d’un maximum d’influences pour se construire des fondations salutaires et un univers aussi large que solide. Le quatuor n’est pas là pour prouver et veut s’amuser, la production n’est jamais boursoufflée, sonne au contraire plutôt naturelle, abrasive même pour renforcer encore mieux ce côté rugueux mais réaliste.

L’album se termine sur un diptyque Demain / Sans Fond, conclusion et bon résumé de tout ce que l’on a découvert au fil de la Fête. Une tension punk ultra nerveuse, à la fois solaire et grise qui provoque un orage de sensations précède un départ sur quelque chose de plus doux, un peu pop-garage acidulé. Une dualité du début à la fin, assumée, contrôlée et jamais déséquilibrée.

La Fête est une carte de visite très estimable et La Flemme signe là un premier acte fort, une œuvre qui brille par sa fraîcheur, ses certitudes autant que ses failles. Un disque plein de promesses pour un groupe qui a toutes les cartes en main pour devenir une place forte de la scène rock hexagonale.

Alexandre De Freitas

La Flemme – La Fête
Label : Exag’ Records
Date de sortie: 25 avril 2025

 

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