Dans ce court format, on ne peut que relever la teneur onirique d’un EP dont le contenu est déconcertant par sa beauté, presque exempte de rythmiques. SomeSurprises confirme son attachement aux mélodies simples mais dont la trame contient plusieurs univers.
L’esprit est comparable à un grenier où la poussière s’est amoncelée, il suffit d’un souffle pour que soit réactivée la mécanique de la pensée. Même si le temps semble s’être arrêté dans cet espace clos, à l’abri du monde, il n’en est rien, les saisons continuent de déverser leurs imprécations comme reflet d’un monde inversé. Natasha El-Sergany est une lumière dans les ténèbres qui nous entourent, par delà sa musique, elle transmet au travers du canal musical de SomeSurprises, un message universel.
Voilà un mois qu’est sorti Year Without Spring. Bien que ce nouvel EP soit constitué de trois titres, il faut préciser que Natasha -El-Sergany est une artiste plutôt discrète, concentrée sur son ouvrage plutôt que sur son image. Après Perseids, album qui a consacré définitivement SomeSurprises, le besoin irrépressible de replonger dans ces couleurs mélodiques qu’infuse ce nouvel EP, était plus qu’une nécessité, un besoin. Il n’est nullement question de changement climatique, mais d’un bouleversement dans l’âme altérée par le temps, cet ennemi qui nous pousse à ignorer les drames du présent. SomeSurprises regarde l’obscurantisme dans les yeux et le transforme en une palette d’émotions vivaces. Il suffit d’écouter Lush pour s’en convaincre, hautement éthéré avec cette beauté inépuisable dont Natasha a le secret. Des guitares immergées dans un chant toujours aussi équilibré. Cette expérience vécue de la musique se prolonge dans une volonté de vivre, des énergies cachées que sont la composition. Justement, les influences sont revendiquées de Nick Drake ( notamment dans Endless dont la mélancolie se dissout à mesure que les guitares échafaudent leurs arpèges avec un final plus dépoilé, vibrant). Ce qui est à l’origine de cette beauté est cette conscience imminente et presque miraculeuse d’une puissance qui soulage cette laideur existentielle dont on ressent la réalité.
Entièrement dédié à un organisme indépendant (Super Familia King County) d’aide aux jeunes sans papiers, l’implication se veut être humaniste, soutien élémentaire aux enfants victimes de guerres, d’exil. L’inspiration puise beaucoup des multiples vies de la grand-mère de Natasha, cette transmission se fait au travers des voyages, de la poésie qui irriguait l’existence de ses aînés. Une autre façon de parcourir le globe, le temps, l’espace.
SomeSurprises induit une panoplie de sentiments, de sensations, une beauté céleste reliée à la terre, la nature, qui fait sens dans un monde désincarné, où notre humanité se désagrège lentement, sans qu’aucune option ne soit envisagée, sauf celle que prodigue Natasha. Il suffit d’écouter ses textes. C’est depuis Seattle, que le désormais quatuor s’exonère des légendes rattachées au mouvement grunge, car il y a une scène toute autre, indéfinissable. Parler de shoegaze serait réducteur. Outre l’évocation onirique des 3 compositions, les références invoquées sont très larges, signe d’une conscience du monde. Aux voix harmonieuses, aux guitares éthérées, SomeSuprises nous étonne encore par sa simplicité et son sens mélodique. Une incursion vers des paysages, où les fleurs, les arbres murmurent leurs sonnets.
Franck irle